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Civilisation de la poubelle

Par Agnès Maillard
Benne à recyclables pleine de livres
26 février 2018

Benne à recyclables pleine de livres

Alors ça, c’est ce que j’ai trouvé dans une poubelle à déchets recyclables à la déchetterie Trigone à Auch dans le Gers.
En fait, c’est ce que j’ai trouvé dans quatre bennes à ordures pleines donc… de livres de la bibliothèque de prêt du Gers.
Je suis allée chez Emmaüs, qui a un centre de collecte juste en face, pour leur demander si ça les intéresse : en fait, on n’a pas le droit d’y toucher, même si c’est sur la voie publique, on doit nous appeler d’abord.
Je découvre le gâchis et la propriété privée des ordures.

Société de la surabondance

Des bibliothécaires connectés m’ont appris à la suite de ce message qu’il s’agit là d’une opération de désherbage tout à fait normale et banale dans les centres de prêts : ils vident les rayons des livres qui sont abimés ou plus du tout empruntés.

Pour info, et ce n’est pas très connu, les livres en question s’ils ont été désherbés de la bibliothèque départementale, c’est pour des raisons comme la péremption des infos, l’état physique mauvais, la vieillesse des documents tout simplement. Et un autre critère : le taux d’emprunt.

Tout cela fait qu’il serait irrespectueux envers l’Afrique de leur envoyer ! Des infos périmées, ça servirait à quoi ?!

Enfin, autre raison : il faut l’accord du conseil départemental pour en faire quoi que ce soit : foire aux livres, les donner, ou même les envoyer dans les pays qui en auraient besoin.
Bref, s’ils sont là c’est pour une raison… Les livres vivent : ils naissent et il meurent !
Ça a mis beaucoup de temps à rentrer en médiathèque le désherbage (retirer les documents des rayons) et c’est toujours très critique.

Même sous forme d’ordures, ces livres ne peuvent pas être libérés sans délibération de la collectivité locale responsable. Il y aurait aussi un souci de marché public.

Donc tout le monde trouve beaucoup plus simple de balancer à la poubelle, ni vu ni connu plutôt que de libérer.

Un autre bibliothécaire a ajouté ce point de vue particulièrement perspicace :

C’est en effet une pratique normale. Parfois, selon les environnements juridiques je veux dire, c’est interdit de les remettre sur le marché, pour ne pas faire de la concurrence déloyale aux libraires.

Parfois, les bibliothèques les jettent les plus discrètement possible, parce que le public comprend mal la démarche. Or, il est nécessaire de faire de la place pour des livres plus lus. Par exemple, en lecture publique, après 4-5 ans, un livre ne sort presque jamais.

J’ajouterai même : y a-t-il des livres suffisamment intéressants pour que tu les prennes chez toi ? Oui, alors fais-le.

Et basta.

On vit dans la civilisation de la poubelle. Je sais que c’est déplorable, mais c’est un fait.

En réalité, l’édition produit du livre jetable. C’est même plus général que ça. C’est de l’industrie. Du divertissement. Mais de l’industrie.

Pour la petite histoire, j’ai même participé à une association qui récupérait les livres jetés par les bibliothèques (les désherbages) pour monter des bibliothèques scolaires en Afrique francophone. Hé bien, on a arrêté. Maintenant on achète des livres neufs en Afrique francophone. C’est bien plus utile.

Et voilà, des livres comme des pots de yaourt, en pack de 12, avec une DLC au cul et une vente au kilo pour finir, pour les bibliothèques qui ont le temps et l’autorisation pour organiser une braderie de désherbage.

Obsolescence de la pensée

À l’autre bout du spectre, il y a toutes ces maisons où je suis passée et où il n’y a pratiquement jamais eu la place pour le moindre ouvrage. Il y a une autre production à la chaine, celle de gosses qui n’ont jamais ouvert un livre ou jamais vu quelqu’un lire, en dehors de la télé ou de l’école, deux fenêtres sur des mondes à la fois lointains, rêvés et hostiles. Il y a aussi tout ce parcours scolaire qualifiant pour la vie qui est soigneusement calibré autour de la maitrise des références livresques et de l’aisance de la lecture et du discours.

J’ai toujours en tête l’image d’un autodafé qui signerait la fin de la civilisation et le début de la barbarie.

Illustration de l'autodafé nazi du 9 mai 1933.

Illustration magnifique de Michel Kichka sur son article de blog consacré à l’autodafé nazi.

Mais en fait, on n’a même plus besoin de bruler les livres, il suffisait d’en faire des objets de consommation. En passant du brasier au compost, on a évacué toute charge émotionnelle de la destruction de l’œuvre.

En dernier lieu, je m’interroge à présent sur la valeur même de l’acte créatif, sur l’investissement phénoménal de l’auteur qui va consacrer une, deux, voire dix années de sa vie à pondre son œuvre, qui fera le tour des maisons d’édition usines comme un mendiant, qui ne grattera qu’un ou deux mois de SMIC de droits d’auteur s’il est vraiment chanceux et dont le fruit de la pensée finira au pilon avant d’être molesté une ultime fois dans une poubelle géante à couvercle jaune.

Pendant longtemps, le livre a été comme une ancre jetée dans l’éternité.
À présent, ce n’est plus rien qu’un consommable comme un autre.

43 Commentaires

  1. Ce que l’on fait aux choses et aux animaux, on le fait aux homme.

    L’acte de faire une chose, crée dans le cerveau des chemin neuronaux, des résolutions de problématiques qui ensuite sont ‘challengées’ dans les autres situations pour voir si elles sont pertinentes. Le processus le plus compliqué est de les créer, non de les utiliser. Cette mode de l’humain jetable est semée dans tous ses actes du quotidien qui semblent normaux à la majorité.
    Pour étayer cette affirmation, un étude montre que la prise régulière de paracétamol, détruit ou réduit la capacité à l’empathie des gens qui le prennent. Ainsi sous paracétamol (qui inhibe les réseaux neuronaux de la douleur) on inhibe également les réseaux qui permettent de comprendre la douleur des autres.

    Marrant comme le battement d’aile d’un papillon…

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  2. C’est étrange car à Bordeaux, où il y a de nombreuses bibliothèques municipales, les désherbage sont publics, font l’objet d’une communication, et les livres sont vendus 1 ou 2€ (au profit d’une association je crois) avec une limite à 5 livres par personne par vente.

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    • C’est selon la volonté du prince : ce sont les collectivités locales qui décident de ce qui va être fait ou pas.
      Après, cela n’enlève rien à la réflexion sur la place de la création dans la civilisation du détritus.

      Réponse
      • Cette réflexion est même sans doute la pierre angulaire de votre questionnement. Que j’aborderais sous un angle plus personnel, la question de notre présence au monde, de notre existence, oui. Je me la suis trop souvent posée, trop dans la mesure où il me semble qu’il est trop tard pour y apporter une réponse intelligente ou intelligible que je sais n’avoir pas comprise. D’autant que je ne doute pas, bien que ne lisant pas, que les bibliothèques (en herbe…) soient remplie de la pensée philosophique, ésotérique, religieuse qui explique depuis cent mille ans en quoi cette présence est médiocre.
        Mais je crois bien lire, dans votre billet ou votre réponse, l’aspect vertigineux du prix de la pensée construite, de l’abnégation, du don de l’écrivaine, du moraliste, des scientifiques maigrement récompensés dont la connaissance même n’a qu’un temps lorsqu’ils basculent dans l’inconnu du futur antérieur. Aujourd’hui, nous sommes poursuivis par l’impression de littéralement posséder la connaissance des siècles, et de fait nous avons accumulé des milliards de feuilles de papier qui recouvrent la réflexion de plusieurs générations récentes (sans parler des manuscrits anciens et signes antiques).
        On pourrait parler du charme suranné du livre ancien. Par ancien, je pense à ce qui fut publié il n’y a même que 25 ans peut-être si ce n’est au cours des siècles récents. J’ai longtemps été attiré par le livre d’avant, celui donc que je ne lirais pas pour autant. Souvenir du parfum de ceux qui remplissaient les bibliothèques de mes grands-parents (et des J.Verne qu’enfant je dévorais). Permets-moi, lecteur lectrice (faut faire vachement gaffe désormais) d’évoquer cette expérience et son aboutissement, je crois : deux générations ont passé, et je me retrouve co-héritier de montagnes de livres accumulés par mes parents, qui aimaient tant l’Art qu’ils remplirent des étagères de « beaux livres », comme on aimait à les désigner. De fait, ces témoins du passé si récent mais d’un siècle révolu, certains émouvants (l’Art roman en noir blanc par exemple), d’autres simplement périmés, fanés et dignes, sont désormais un immense fardeau pour nous qui avons aussi vécu. Nous en savons le prix d’hier, et ils s’en iront au pilon par cartons entiers, ces vies sont passées. Personne n’en veut, nous avons démarché pour leur donner un peu de temps encore.
        Oui, ces livres sont nos vies, nos vies à leur image, et je pense que c’est cela qui nous interpelle singulièrement. Oui, il semble à plus d’un que notre dite « civilisation » soit finie et si nous comprenons le ressort du déni de cette hypothèse chez tant d’autres, il se peut que la réalité dont les principes s’appliquent quoi que nous imaginions demeure pour longtemps impénétrable pour nos sens. Allons, pardon pour cette philo à deux anciens francs, j’avais envie de causer…

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        • merci à vous chère commentatrice.
          j’ ajouterais qu’ à l’ aune d’ un temps court, 20 ans , 30 ans cela est vrai les livres sont périmés.
          hors « homme » cela vient d’ humus, non.
          l’ humus est si vieux qu’ il ne sent même pas périmé..
          reste à voir ce qu ‘il sera dans quelques (courts ) temps, péremption ou source d’ émerveillement par le livre, ajouté possiblement au saint internet.
          la vie renseigne

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  3. Quand j’ai découvert cette pratique, ça m’avait estomaquée. Des bibliothécaires bien-pensants m’ont alors expliqué que c’était bien normal -voire que j’étais un peu neuneu : air condescendant, etc. Obsolescence, mauvais état : mêmes arguments. Sauf que… j’ai trouvé dans ces désherbages sauvages des monuments de la littérature, qui sont toujours chez moi. J’ai trouvé aussi des livres pour lesquels avaient été organisées des rencontres avec l’auteur… deux ans avant (avec dépenses à la clef, hébergement, pub, média, etc)… Une fois j’ai même vu une benne, carrément sur le trottoir devant la biblio ! A l’époque, ça avait fini par faire un foin du tonnerre (même l’indigente presse locale s’en était émue, c’est dire). Depuis, il y a eu du mieux (pour une fois, soulignons). Des ventes ont été organisées, 1 € le bouquin. Les gens faisaient la queue avec leurs cabas à roulettes. J’ai dû acheter des étagères ;-). Et les « médiathécaires » de s’étonner : « ça alors, les gens viennent les acheter ». Ouais, c’est dingue, parfois le pauvre se cultive, et tu n’es même pas idée de ce qui l’intéresse.

    Réponse
  4. Bonjour,
    Le réseau de bibliothèque auquel je suis inscrit fait un désherbage annuel et je peux vous dire qu’il vaut mieux ne pas arriver trop tard faute de quoi il ne reste que le « Comment maigrir en mangeant un choux par semaine? » édition 1992. Je fais prof de géo dans la vie et mon CDI désherbe aussi et je ne vois pas le problème à jeter des livres de géographie dans lesquels figure l’URSS et la Yougoslavie ou encore l’économie de la France de 1989. Des atlas historiques prendront le relais, des chercheurs travailleront à reprendre ces informations dans des problématiques actualisées. En revanche je vous rejoins sur le gâchis et ce qu’il dit de notre société quant au fait jeter des romans, des bandes dessinées, des ouvrages de fiction, des livres d’art qui ne perdent jamais de leur sens.
    Au plaisir de vous lire.

    Réponse
    • On se dépêche de ‘désherber » aussi les livres d’histoire pour éviter qu’en regardant ceux d’il y a 20 ans on s’aperçoive que la présentation des faits historiques peut aussi être un choix politique.

      Concernant la géographie, effectivement l’urss à disparu et probablement que les reliefs ont été un peu limé, mais le livre de géographie devient alors partiellement un livre d’histoire. Je ne fais pas confiance aux atlas historiques qui ‘actualisent’ les problématiques, en faisant du cheery picking pour coller à une ligne éditoriale

      Je pense qu’on jette les livres à la poubelle pour éviter lorsque l’on compare entre le livre des années 70 et le livre actuel, de se demander comment on a pu avaler les conneries de 1970, et ce faisant, ce demandant quelles conneries on est en train d’avaler aujourd’hui.

      Mais je sais que j’ai mauvais fond 😉
      Dans mon esprit c’est comme supprimer des gens sur les photos car ils sont devenus infréquentable.

      Réponse
      • Il y a aussi derrière cette histoire l’idée de le nouveau est forcément préférable…
        citation Churchill : un peuple qui oublie son passé est condamné à le revivre

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        • Il y a également le problème de place physique à gérer. Peut être étendre la surface de stockage, ouvrir une autre salle, créer des boites à livres…

          La question que l’on peut se poser est : si un livre est jugé ne plus être digne d’intérêts, quel ressort intellectuel à pu être en mouvement pour qu’à un moment il le fut ?

          Réponse
          • Qui décide de l’intérêt d’un livre et en fonction de quels critères?

          • je ne sais pas. J’imagine que celui qui l’achète et celui qui décide de le jeter portent un jugement. Maintenant les critères….

          • Les bibliothécaires (dont je fais partie) ne désherbent pas n’importe comment. Il existe un certain nombre de critères
            http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/documents/61098-desherbage.pdf
            Bien entendu une part de subjectivité est toujours à prendre en compte et il est évident que nous travaillons dans une société capitaliste. L’édition est un marché comme un autre. D’ailleurs quand on voit le nombre d’ouvrages neufs jetés par les éditeurs, je trouve que ça fait bien plus froid dans le dos que ce qui est jeté dans les bibliothèques… Au moins nous jetons des livres qui ont vécu.

            Et il faut bien comprendre qu’une bibliothèque municipale, c’est plutôt un fonds composé de Marc Lévy, Françoise Bourdin et cie que de Victor Hugo et Zola (même si nous en avons également !).

  5. Bien d’accord avec ce billet.

    J’ajoute que, à mon humble avis, le numérique ne fait qu’aggraver cette situation, même si on pourrait croire le contraire.

    On pourrait en effet croire que, les coûts de stockage étant insignifiants et ce genre de choses, détruire l’invendu serait moins nécessaire.

    Je pense que c’est une illusion d’optique. La logique de la rareté s’applique (cf ton autre billet Agnès sur Mars, le désert, il faudrait retrouver le lien). Le problème n’est pas le coût de stockage, il est la logique capitaliste elle-même.

    Ce sera même pire avec la livre numérique.

    Avec le livre numérique, on va vers des livres loués, ou juste des licenses pour lire des livres. Une fois que la location est terminée ou la license révoquée, le livre disparait de votre liseuse dès votre prochaine connexion. Le jouet étant verrouillé, ses données étant cryptés, vous ne pouvez pas avoir fait de backups.

    Bref, à part des bibliothèques publiques, stockant des livres en papier, correctement organisées, aérées… et correctement financées… je ne vois pas d’issue. Nostalgia’s for geeks.

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  6. Une pratique normale ? Foutez-moi Stendhal, Zola et Hugo à la poubelle. Y’a un nouveau Marc Lévi qui arrive demain !

    Je me souviens d’un copain ivre de rage. Il avait récupéré 400 livres dans les poubelles de la médiathèque de sa ville. Quatre cents parce qu’il ne pouvait pas en mettre plus dans son petit appartement. La médiathèque venait de jeter son fond d’histoire sociale, de pleines bennes, alors qu’elle déménageait pour des locaux bien plus grands. Les bibliothécaires contemporains ne voyaient pas pourquoi des générations de bibliothécaires de cette banlieue rouge avaient patiemment accumulé les livres d’histoire du syndicalisme, des partis de gauche, des mouvements libertaires, du mutualisme, des coopératives, des grèves, des sabotages, bref, de tout ce qui constitue le mouvement ouvrier. Comme le copain était lui-même un très bon connaisseur du domaine, il n’avait conservé que des ouvrages à peu près introuvables sauf à prix d’or auprès des librairies spécialisées en livres anciens. C’est ainsi que s’est terminée l’histoire d’une bibliothèque dont le fond était connu des chercheurs comme des historiens amateurs de toute la France…

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    • « Qui contrôle le passé contrôle l’avenir. Qui contrôle le présent contrôle le passé. » (George Orwell, ‘1984’, 1948)

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    • Édifiant, merci, et qui concrétise bien le malaise que je ressens depuis ma découverte de vendredi dernier. Qui décide de ce qui est intéressant ou non, de ce qui mérite de la place ou non, en fonction de quelles véritables motivations? Est-ce que le nouveau est mieux?
      J’avoue dégueuler le culte de la nouveauté par tous les orifices disponibles…

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  7. Ho mon dieu, on jette des livres usagers !!!
    Faut sortir de chez vous de temps en temps, vous sauriez que c’est courant, normal et que ça ne vient pas d’arriver. Depuis que l’Humain sait écrire, il passe son temps à recopier les livres usés par l’usage et le temps. Sinon, vous préconisez quoi ? Qu’on empile les bouquins en mauvais état et/ou dont le contenu est obsolète dans un hangar à prendre l’humidité, à tomber tranquillement en poussière. Dans mon patelin, la médiathèque propose ses livres usagers au public lors d’une foire aux livres. Et pratiquement tout part sur les deux jours.

    Mais franchement, il faut arrêter de sacraliser les bouquins comme s’ils renfermaient tout le savoir du monde. Ce n’est pas le cas. Un livre c’est avant tout un support périssable, hé oui, un truc qui s’use vite si on l’utilise de façon intensive et régulièrement si on le stocke n’importe où et n’importe comment.

    Donc oui, un bouquin finira immanquablement à la poubelle à un moment ou un autre et comme le papier est 100 % recyclé, il servira à imprimer d’autres bouquins.

    Je ne vois pas où il y a de quoi s’indigner. Mais bon c’est votre truc de vous indigner. C’est facile de s’indigner sur tout et n’importe quoi.

    Je ne vous félicité pas pour votre site dont les articles sont beaucoup de blabla sans pratiquement aucun fond. Heureusement que vos potes de Rezo.net vous mettent en avant…

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    • On pourrait reprendre le texte, et remplacer livres par homme, ca marcherait pareil.

      Imaginons un instant que les anciens faisait pareil. Nous ne retrouverions qu’une seule tablette de cire avec les dernières informations, toutes les précédentes ayant été refondues pour faire les suivantes. Idem, les peintures sur les murs des grottes, chaque civilisation repassant par dessus les trucs qui étaient, par le fait, périmés. Pourquoi ne pas faire la même chose avec les peintures, on ne garderait que les 5 dernières de chaque artiste.

      Oui certains sacralisent les livres (et j’en fait partie), mais ce n’est pas trop société de consommation-compatible : on achète, on lit, puis on jette pour en acheter un autre. On culpabilise le péquin moyen parce qu’il ferme pas son robinet lorsqu’il se lave les dents et ne pisse pas sous sa douche (économie de 5-7 litres de chasse d’eau), mais passer au pilon un livre, refaire du papier avec une tonne d’eau, du chlore pour produire un autre livre. Alors que le précédent peut toujours être lu, par la même personne 2-3 ans après ou par une autre personne: voisin, enfants, petits enfants, cousins.

      On n’a pas l’impression d’être pris pour des jambons.

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  8. Bonsoir à tous,
    Deux exemples me reviennent en mémoire :
    – à Kénitra (Maroc), les livres dont la bibliothèque de l’Ecole Don Bosco voulait se séparer étaient tout simplement donnés aux adhérents qui les voulaient;
    – à Montréal, des étagères étaient aménagées dans un parc pour qu’on puisse y déposer ou y prendre autant de livres qu’on le souhaite.

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    • Pour « libérer » les livres, il y a pas mal d’idées.

      Déjà les « boîtes à livre » qui fleurissent à droite à gauche. Petites niches sans clefs, déposées comme des boites aux lettres sur le trottoir ou fixées au mur des maisons, fabriquées par ceux qui s’en donnent la peine, dans lesquelles chacun peut déposer ou prendre des livres. J’ai croisé de ces bibliothèques libres en région parisienne tout comme en plein coeur du parc national des volcans d’Auvergne.
      Ou encore, les livres libres… Ces objets dans la couverture desquels quelau’un prend le soin d’écrire :  » je suis un livre libre, lisez moi et déposez moi où bon vous semble, je n’appartient à personne ». On en a ramassé un une fois sur une ère d’autoroute… Sympathique initiative, mais qui a le défaut de détériorer plus rapidement les livres en questions (parce que laissés par n’importe qui n’importe où sous la pluie… voire jeté par un vendeur de livre qui l’aura trouvé… hum…).

      Maintenant, quand on est bibliothèque municipale et qu’on doit faire le ménage… pas dit qu’on ait le temps de faire dans le détail…

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  9. Mouaip…
    J’aime lire et j’aime le livre papier.
    Mais dans une société qui produit du livre papier comme on produit des bouteilles en plastique, s’étonner d’en croiser des bennes entières aller vers leur dernières demeures (ou un centre de recyclage) me semble un brin candide 🙂 .
    Une bibliothèque municipale n’est pas la bibliothèque d’Alexandrie pour les ouvrages qu’on y trouve… Non?
    Le véritable impact de cette industrie doit sûrement être écologique… Et là y’a à s’inquiéter de l’imprimerie à gogo (mais ça ne concerne pas que le livre, pour le coup).

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    • Je considère également qu’il faut d’abord considérer la Production de livres. Je sors d’un salon du livre : une noyade ! un tournis ! Comment choisir et savoir ce qui est important ? De sorte que la critique des médias dominants et l’information des bibliothèquaires est un goulot d’étranglement : est-il le bon ? Parfois il est bon de critiquer leurs choix, telle cette abondance de romans traduits de l’américain ou de suggérer un achat : mais faites-vous le poids contre leur info professionnelle ? Non, vous signalez seulement, vous ne savez pas leur apppréciation.
      Enfin, il y a la politique culturelle : apparemment, le Ministère souhaite des achats neufs, en livres brochés (pas en Poche), et qu’on jette sans transmettre : les biblios ne peuvent nuire aux libraires. En fait, ce serait légitime de les proposer en 2e main : on cherche bien des livres rares ! Et le montant de vente pourrait profiter à un besoin associatif… Mais surtout : les livres pourraient circuler entre bibliothèques avec un certain succès prolongé.

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  10. Il est possible de donner des livres de bibliothèque à des associations ou de faire des ventes, etc. mais ça suppose une organisation et donc du temps et une ou plusieurs personnes pour le faire, ce qui n’est pas acquis.
    Donc parfois ça finit à la poubelle, même si en théorie ça se raréfie.
    Pour ce qui est de l’action d’enlever des livres de bibliothèques, on met où les nouveaux si les anciens restent en place ? On arrête d’en acheter, on repousse les murs ?
    Donc faut faire du tri.
    Enfin, ne confondez pas les bib. municipales (à vocation grand public) et les BU d’universités d’histoire hein…
    Pour les autres qui veulent jetez Zola and co à la place de Lévy…. non rien, restez tels quels 🙂
    Parole de bib.

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  11. Salut.
    Les livres qui ne servent plus à rien sont à jeter, car ils prennent de la place pour les livres qui eux sont empruntés, utilisés, d’une manière ou d’une autre. Après chaque collectivité gère le truc comme il veut, chaque centre de ressources aussi.
    Mais aucune destruction totale de l’information n’est possible, au moins en France.
    Si vous cherchez bien, le numéro 432 de la revue Pouet de mars 1987, vous le retrouverez à maintes autres exemplaires ailleurs ; mais il est fort peu probable que vous cherchiez cet exemplaire, vu que seul un chercheur ou un curieux ayant besoin de cette source pour un travail bien précis va faire l’effort de trouver les exemplaires qui restent – effort minime vu que toutes les données de catalogues et localisations de documents ou presque sont sur le web en accès libre.
    Je comprends que l’on déplore la surproduction de livres, mais je ne comprends pas pourquoi on critique ainsi plus la destruction (due au gâchis de la surproduction) que, seulement, la surproduction.
    Il n’y a pas, en temps court, de destruction d’information ; il y a des destruction de papier, ou plutôt du recyclage de papier.
    A moyen ou long terme tout sera détruit par contre (cf. machine à explorer le temps de Wells, au pif, ou Peter Steele : « Everything Dies »).
    Comprends pas le sens de votre billet en fait – par ailleurs, pourquoi la culture devrait-elle forcément passer par l’imprimé ? C’est un biais culturel, c’est le cas de le dire.

    Réponse
  12. Je viens juste de trouver un livre ancien que je cherchais depuis longtemps, trouvé sur un site de petites annonces .
    Des livres plein les bennes de recyclage, c’est courant et cela m’indigne .

    Réponse
  13. Ah, les livres les plus lus… et si je découvre un auteur et cherche d’autres titres plus anciens? Je comprends mieux pourquoi je ne m’y suis pas retrouvée dans cette petite bibliothèque de mon quartier… je suis passée aux bouquinistes, c’est plus satisfaisant, même si c’est un petit budget. Je suis d’accord avec Agnès, voir un monceau de livre dans une benne, ça fait mal. Donc, aller à la bibliothèque et entamer une discussion pour qu’à l’avenir les livres soient revendus ou patchés « circule livre », ou encore que les bars du coins mettent des étagères (j’ai trouvé pas mal de super livres dans les bars à Paris quand j’y habitais), bref il y a un truc à faire pour le prochain « désherbage » de cette bibliothèque là. Alors Agnès, prête à passer à l’action? (je me permets de vous appeler Agnès car je vous lis depuis des années…)

    Réponse
  14. Je trouve hallucinantes les remarques des bibliothécaires. Qu’il y ait des soucis de place et de temps est une donnée que tout le monde comprend, qu’il y ait des soucis de logistique si on veut choisir un autre moyen tout le monde peut l’entendre, mais ces excuses à 2 balles genre tout meurt un jour, ou il en reste un exemplaire quelque part que l’on peu trouver, c’est un biais de confirmation (je fais du cherry picking sur les informations). Il serait tellement simple de poser les problématiques et écouter ce que les gens pensent qu’il peut être fait. Même un livre d’un intérêt dont on peut douter peut éveiller une passion chez quelqu’un. Ainsi le reader digest spécial macramé des années 70, peut permettre à un gamine de 15 ans de faire un porte-pot de fleur plutôt que de candy crusher. Si cela lui sauve 2 après-midi, cela en vaut la peine. Il faut juste trouver les bonnes personnes.

    Tous le monde meurt un jour, pourquoi se faire ch*er à essayer de sauver des sdf du froid ? de toute façon ils vont bien mourir un jour. On peut sortir ces même arguments avec les poubelles remplies de pain du jour et des aliments que l’on javelise ‘ou ‘sable’ pour éviter qu’ils soient récupérés. Vous comprenez ma brave dame, il y a un risque que le produit soit mauvais. cool, on se soucis de la santé des gens qui crèvent de froid et de faim dans la rue, on sait jamais s’ils attrapaient un bonne ch*asse avant de crever.
    Par contre, pour les mettre en vente, il n’y a plus de soucis :
    https://www.ouest-france.fr/bretagne/des-produits-perimes-vendus-en-toute-legalite-3060419

    Imaginons que nous n’ayons plus de place sur terre, que les livres soient partout en de millions d’exemplaires, que l’on en jette quelques uns qui sont déchirés, dont le brochage est mort, dont des cahiers se perdent pourquoi pas.Mais je suis persuadé qu’il y a dans chaque ville, des zones ‘populaires’ ou les gens n’ont pas de livres chez eux et ils pourraient héberger quelques exemplaires de ces livres qui partent pourrir dans les bennes. Ensuite s’ils disparaissent parce que le petit à déchiré des pages ou crayonné dessus (ou qu’il a été donné au voisin) cela ne me pose plus trop de soucis.

    Oui cela demande du temps, mais ce serait du temps bien mieux employé que le désherbage des massifs. On pourrait même considérer cela comme mission de service public encore plus importante que contrôler le basané dans la rue pour être certain qu’il a une carte d’identité et pas 1 gr de shit. ou vérifier que personne ne roule à 52 au lieu de 50 dans une périphérie de ville. Ou être certain que la maman célibataire déclarée comme parent isolé n’ait pas 2 brosses à dents dans son verre de la sale de bain. Étonnant comme on trouve du temps sans problème pour la répression, mais dès que c’est pour apporter du plus, on en manque cruellement, sacré choix de société. Mais comme tout meurt un jour, qu’est-ce que cela change qu’un arabe se soit fait tabassé un ou deux fois avant de mourir ?

    Mais le biais de confirmation joue à plein. Lorsque l’on fait une chose en groupe (les bibliothécaire dans ce cas) on trouve normal notre action et on rejette par nature les objections qui viennent du dehors du groupe (parce que les gens ne savent pas hein !). There Is No Alternatives mes friends.

    ps : on a beau jeu d’accuser les gens de ne pas se battre contre la sur-production, mais combien de vente de la dernière bouse d’un écrivaillon un peu connu est le fait des milliers de bibliothèques ? Si elles n’achetaient pas à chaque fois, l’éditeur demanderait-il tant de livres à son ‘poulain’ ?

    Réponse
  15. Je reste dubitatif quant au thème de ce post.

    Que l’on considère le livre comme le fondement de notre culture peut individuellement s’entendre, c’est à dire pour ceux qui en possède les moyens, mais décrier les désherbages nécessaires aux bibliothèques pour bien fonctionner comme une agression culturelle me semble pour le moins exagéré.

    C’est quoi la culture ?
    C’est la transmission et la critique d’un savoir commun.

    Le support matériel écrit n’a donc pas l’intérêt majeur que vous développez ici, sinon à créer de la distance pour l’acquis de cette transmission et à générer plutôt la méconnaissance des peuples sur ces acquis qui sont et demeurent fondamentaux à toute l’espèce humaine pour sa survie.

    Avec l’écrit, il faut non seulement la lapalissade de savoir lire, mais aussi, posséder pleinement la langue et les codes correspondants à cette écriture pour y accéder, la critiquer et la partager réellement, ce qui n’est pas donné à tous.
    Je parle ici en toutes connaissance de causes. 😉

    Ainsi, ériger la transmission écrite en fondement culturel de l’espèce humaine c’est créer une hiérarchisation dans le partage de cet acquis et l’évitement de sa critique par tous.

    Je rejoinds donc l’intervenant qui indiquait que le désherbage des ouvrages dans les bibliothèques étant une nécessité de bon fonctionnement, que ce soit fait par dons ou à la benne de recyclage est tout à fait compatible avec le rôle des bibliothèques publiques et n’est pas en soit un sujet de transgression sociale, morale ou autres.

    Réponse
    • Je crois que nous ne sommes pas d’accord. Je comprends ton point de vue qui érige en dogme que la lecture c’est très surfait car il faut savoir lire.

      Maintenant, de ce strict point de vue, il ne faut pas oublier que savoir lire a toujours été un préalable à l’émancipation, que ce soit des femmes ou des pauvres. Il faut être un doux rêveur pour penser que le bouche à oreille et le colportage du ménestrel peut changer quoi que ce soit.

      Toujours de ce point de vue, ne pas savoir lire c’est aussi s’enchaîner à la volonté de l’autre pour apprendre des choses ou acquérir un peu de loisir.

      MAIS mon point de vue, je ne parle pas du livre en lui même (même si il occupe une place particulière, car je suis un grand lecteur) mais de la société de consommation. On ne peut conchier la société de consommation-destruction en expliquant que l’on consomme plus que ce que la planète peut produire, en expliquant que les arbres ne montent pas jusqu’au ciel et _en même temps_ (lol) trouver normal que l’on passe au pillon chaque années des milliers de livres, alors que c’est, par nature, le type de produit le plus facilement réutilisable, qui ne consomme pas d’énergie et qui n’a besoin d’aucune compétence pour l’utiliser. Oui il faut savoir lire, mais même pour un téléphone ou une tablette, un ordinateur il le faut aussi.
      J’ai beau travailler avec un ordinateur qui a plus de 10 ans (et avec un système à jour). Il est plus compliqué de garder un ordinateur 10 ans qu’un livre 200 ans.

      Toujours de ce point de vue de cycle de vie du produit, si le livre avait été lu par une grande majorité des gens et qu’il était hyper connu, les gens pouvant en réciter des passages de tête, que l’on décide de le jeter (et consommer temps, énergie, produits polluants en le transformant en autre livre qui sera jeté dans 10 ans) alors qu’il peut trouver d’autres lecteurs, dans son secteur sans que cela ne coûte à personne, est, de mon point de vue, abject.

      Cela ne coûte rien à les donner et d’ailleurs ceux qui le font n’ont aucun soucis. Cela coûte bien peu de faire des boites à livres. NON, nous sommes dans l’habitude de jeter-détruire pour permettre d’acheter de nouveaux livres que l’on jettera dans 10 ans. Faut faire marcher le commerce mon brave monsieur et habituer les gens à cette constante nouveauté. Que cela vienne des marchands de lessives ou de voitures, je peux comprendre car la vente est leur moteur, mais si même les bibliothécaires participent de cette incurie je suis désespéré. Les ‘gardiens du temple’ des livres en font des produits de consommations jetable.

      tu quoque

      Réponse
    • « Je comprends ton point de vue qui érige en dogme que la lecture c’est très surfait car il faut savoir lire. »

      J’essaie plutôt de présenter la lecture dans son cadre, savoir lire ne consiste pas seulement à déchiffrer mot à mot mais aussi à l’extention de ce que ces mots veulent vraiment dire selon leur contextes et par leurs assemblages, c’est là nous arrivons à l’élitisme par la lecture.
      Je ne préconise pas de ne pas apprendre à lire, juste je replace le dogme (pour parler comme toi) du livre ouvert à tous les lecteurs alors que les moins instruits ne pourront jamais vraiment lire tout ce que lisent et partagent les élites entre elles sans élever d’abord leur instruction, ce qui n’est pas donné à tous, reconnaissons-le.

      La tradition orale porte une autre forme de partage, une forme qui s’adapte mieux à tous, c’est elle qui fit se transmettre les premiers Savoirs avant que les singes, les singes de mon quartier ne surviennent…
      Par exemple, il y a des docs scientifiques à la télé et sur le net qui explicitent leurs propos à davantage de personnes que si elles les lisaient, le dire s’accompagnant naturellement d’attitudes et de mimiques plus communes que l’écriture ne le permet.

      En conclusion, j’interviens ici pour mettre la lecture un peu au-dessous de ce que ce post propose au regard du plus grand nombre de personnes qui bien que sachant lire n’ont quand même pas un accès éducatif libre à tout ce qui est écrit.

      Réponse
      • Et donc, la solution est de remettre en cause la lecture comme une sorte de bien commun de l’humanité pour y substituer des alternatives ‘dégradées’.
        Comme dit plus haut, les moyens alternatifs ne dépendent pas que du message, mais de la volonté d’autres messagers. Messagers qui opèrent un tri sur ce qu’ils veulent transmettre (l’exemple type est le conglomérat médiatique de la décennie), qui filtrent pour que les populations ne puissent pas faire de choix éclairé mais vivent dans une propagande permanente. Ainsi la lecture est l’assurance de ne pas être dépendant de cette horde de chiens enragés aux ordres.
        De plus, si savoir lire n’est pas suffisant car il faut comprendre, cet écueil est partout dans tous les moyens de communication. S’il faut réduire le nombre de mots et de concepts pour que tous puissent comprendre, nous arrivons à Fahrenheit 451, ou la perte des mots et des concepts est l’outil le plus fort pour maintenir la dictature : sans concept pour penser l’oppression et la liberté, l’esclave ne pense même pas qu’il y a une autre alternative.

        C’est marrant cela me rappelle un truc.

        Réponse
      • Je suggère ici qu’on ne place pas l’écriture au-dessus des autres moyens de communication utilisés par l’humain parce que sans média intermédiaire, les messages que nous nous transmettons ont plus de profondeur pour nous atteindre.

        Exemple concret, dans l’entraide des logiciels libres, rien ne vaut les salons publiques pour partager nos connaissances, répondre aux demandes, poser nos questions, voir le matériel utilisé, etc… Et même en langues étrangère !

        Pourquoi n’en serait-il pas de même pour tous les savoirs ?

        L’écriture est un savoir comme tous les autres, ni plus, ni moins et la mettre en tête de tous, c’est en exclure les peuples non pas directement, mais selon des castes établies les unes avec les autres.

        Réponse
        • Il n’est pas question de la mettre en tête, il est juste question de ne pas mettre des livres à la poubelle alors qu’ils pourraient être données. Il est question de ne pas comprendre que certains trouvent cela normal et qu’il faut sortir de nos campagnes.
          Le reste….

          Réponse
        • « il est juste question de ne pas mettre des livres à la poubelle alors qu’ils pourraient être données »

          Ce post relève la spécificité du livre et je réponds sur cette spécifité.
          J’essaie de montrer ici que la lecture n’a pas le privilège de la transmission du savoir et même qu’elle n’y parvient vraiment que dans un milieu social d’accompagnement favorable, et donc au sein d’une élite sociale pré-établie.

          Que les bibliothèques se trouvent contraintes de mettre leurs bouquins en déchetterie est une anecdote qui se déroule dans un milieu général d’irresponsabilité totale où s’impriment autant des tonnes de nourritures produites et misent aurebut ainsi que les surconsommations ostentatoires liés essentiellement à la publicité de type :

          « La consommation rend heureux. »

          Vu dernièrement dans une doc télévisuelle sur les créateurs de la publicité aux us.
          Et rien n’y a changé depuis.
          🙂

          Réponse
  16. « Pendant longtemps, le livre a été comme une ancre jetée dans l’éternité. »
    Ils étaient en fibres d’adamantium ?
    Sérieusement…

    Réponse
  17. En passant, j’ajoute ce témoignage — déposé à la suite de ce papier sur Agoravox — qui apporte sa pierre à l’édifice de la réflexion sur le livre et la mémoire. Parce que finalement, c’est quelque chose dont je parle souvent, la mémoire :

    Il y a une bibliothèque municipale où j’allais quand j’étais collégien, elle accumulait des livres depuis le XVIIe siècle, elle achetait très peu de livres neufs qu’elle choisissait après de longues discussions, et qu’elle faisait relier tous les livres en cuir ou en toile pour pouvoir les conserver le plus longtemps possible (la reliure multiplie par 3 ou 4 le cout de revient du livre). Il y avait une salle de romans qui étaient tous reliés en cuir rouge, avec tous les classiques et un tas d’auteurs complètement inconnus ou oubliés qu’il était impossible de trouver dans une librairie de livres neufs. On y trouvait absolument tout sur tous les sujets encyclopédiques depuis un traité de composition d’une symphonie, jusqu’à de vieux atlas, en passant par des recueils des coutumes de Normandie ou de Paris, des tas de livres et d’encyclopédies qu’on ne pouvait trouver nulle part, tout ce qui avait été estimé comme étant un ouvrage classique méritant d’être acheté, relié et conservé pour l’éternité. Il y avait des collections complètes de revues anciennes comme le Magasin pittoresque ou la Revue des voyages (1881-1940), le Journal des voyages, etc. où on trouvait des milliers de récits avec des gravures incroyables montrant des tempêtes, des naufrages, des cannibales posant autour de la marmite. Cette bibliothèque était toujours pleine de gens qui venaient lire sur place des usuels, des collégiens comme moi et des espèces de savants à barbe blanche comme dans Tintin. C’était vraiment un monde enchanté.

    Un jour la vieille bibliothécaire est partie en retraite, une jeune pétasse avec un diplôme de bibliothéconomie est arrivée, elle a parlé de faire vivre et de dynamiser le fonds, elle obtenu de remplacer tous les rayonnages et les vitrines en bois sculpté par des meubles plus pratiques pour faire un classement intelligent selon les normes internationales, la bibliothèque a fermé un an. À l’ouverture, tous les rayonnages étaient en tôle comme dans les bibliothèques universitaires, tous les livres étaient neufs, sauf dans une pièce où avaient été conservés sous clés quelques milliers de livres allant du XVIe à la fin du XVIIIe siècle qu’un adjoint était parvenu à faire conserver. C’est quelqu’un qui ne lit pas et qui est persuadé que le livre le plus récent est toujours meilleur que le précédent. Le dernier essai de Bernard-Henri Lévy dépasse Condition de l’homme moderne d’Hannah Arendt.

    Les nouveaux livres, c’était qu’on trouvait dans toutes les librairies du moment, classés comme à la FNAC, des livres que n’importe qui pouvait acheter, sur les régimes, sur la psychanalyse, les derniers essais des hommes politiques et des journalistes, des œuvres complètement éphémères qui ne se vendent que sous le feu de la promotion. Il y avait un demi-étage sur la Shoah, le procès de Nuremberg, l’antisémitisme, le racisme, le fascisme, plein d’essais sur les sujets de société : le féminisme, l’écologie, le développement durable, la démocratie.

    La fréquentation de la bibliothèque est tombée à presque rien pendant les années qui ont suivi, la mairie a fait de la publicité en appelant les habitants à visiter la nouvelle bibliothèque, rien n’y a fait.

    La bibliothécaire qui avait dépensé plus d’argent en deux ans autant que ses prédécesseurs en deux siècles, pense que c’est prie que son fonds n’est pas assez actuel, pas assez innovant, elle épure son fonds de 10 % tous les ans pour faire la place des nouvelles parutions qui sont de plus en plus nombreuses. Les maisons d’édition ont été rachetées par des groupes politico-financiers qui ont mis à leur tête des diplômés d’écoles de commerce. Il faut faire de la nouveauté, comme les laboratoires pharmaceutiques : lancer les plus de nouveaux livres possibles dans l’espoir de trouver le blockbuster. Chaque nouveau livre a sa campagne de promotion, si au bout de 3 mois il ne s’en est pas vendu assez, il part au pilon, pour en lancer un autre. Il n’y a plus de collections avec des œuvres qui se rééditent pendant des années, des dizaines d’années, et qui aspirent au classicisme.

    En France on a la chance d’avoir un fonds d’ouvrages imprimés qui est plusieurs milliers de fois plus important que ce qui est en vente à un moment donné. C’était par les bibliothèques publiques qu’on pouvait accéder une partie de tous ces livres qui n’étaient plus édités comme le grand Dictionnaire d’agriculture en 2 volumes de René Dumont, datant de l’époque où il était professeur à l’Agro, les romans de Marcelle Tinayre, des collections d’ouvrages d’érudition très curieux légués à la ville par un bienfaiteur, etc.

    Ces bibliothèques municipales ne servent plus à rien, elles concurrencent les librairies, il faut toutes les fermer.

    Réponse
    • Joli témoignage.

      Mais qui donne l’impression que les bibliothèques municipales sont des genres de temples façon bibliothèque du « nom de la Rose » où les recueils qu’on trouve sont des ouvrages remontant au XVIe siècle, et que les nouveaux inquisiteurs du XXIe siècles menacent d’incendier en brandissant leurs bibles néo-libérales.

      Je sais pas… Mais j’ai pas l’impression qu’une bibliothèque municipale d’un petit bled ait cette vocation, ni d’ailleurs les moyens d’entretenir des livres vieux de plusieurs siècles en les livrant à la consultation publique (ou alors, il faut ré-inventer le métier de recopieur de livres… parce qu’à ce tarif là, les originaux ne vont pas faire long feu).

      Bref, c’est joli comme témoignage, peut-être un brin sentimentaliste et réac à mon goût, quoique sympathique, mais surtout, pas vraiment réaliste (sans mettre la bonne foi de l’auteur de ces lignes en cause).
      Et deuxième remarque, si les bibliothèques municipales affichent essentiellement du livre de production actuelle de masse, quel étonnement y-a-t-il aux phénomènes de désherbage? on n’a jamais généré autant de livres et de brochures en tout genre qu’à notre époque (au grand dam des forêts tropicales) alors pourquoi s’étonner de les voir « mourir » en si grand nombre?

      Réponse
  18. Je repasse une deuxième couche en lisant des commentaires qui me font tiquer.

    J’ai entre les mains un livre édité par le Père Castor. Il est jauni, c’est sûr, mais ce titre n’est plus réédité depuis belle lune. Ce n’est pas affaire de vieux con nostalgique amoureux de vieux papiers : Mon junior adore ce livre depuis longtemps et l’a encore relu hier bien qu’il lise maintenant des textes dix ou cent fois plus longs.

    Le prix est écrit au crayon de papier en page trois. Je l’ai acheté un peu cher à un bouquiniste. Et ce livre vient d’une bibliothèque publique comme les tampons en font foi…

    Je récapitule. Un livre jeté par une bibliothèque en raison de son obsolescence est vendu, en occasion jaunie, quatre fois le prix des livres neufs de la même collection. Et trouve un acquéreur. Et la bibliothèque prétendra sans doute que ce livre n’a plus d’intérêt. Et des fâcheux vont nous expliquer que nous ne sommes pas modernes.

    Paul Éluard — rien que ça ! — a écrit des albums pour enfants illustrés par Jacqueline Duhême — rien que ça ! — qui ne sont plus édités. Alors ces albums se vendent en occasion à des prix stratosphériques. C’est sûr que c’est bien réac de le regretter. Et qu’on ne peut pas regarder la disparition de livres d’Éluard et Duhême comme une agression culturelle.

    Réponse
    • J’ai envie de rajouter combien je suis toujours, encore étonné de me faire traiter de réactionnaire, de sentimental, pourquoi pas d’amoureux pendant qu’on y est, de vieux con en somme, avec tant d’autres qui me semblent également respectables. Manquerait presque l’infamant « utopiste ». Je me demande comment les jeunes imbéciles et les vieux crétins incapables de mesurer la valeur du vécu, du labeur humain, obsédés par un futur inaccessible, réagiront si un jour on devait se désoler de se trouver face à un trou de mémoire mondiale d’un siècle ou plus, parce que le grand ordinateur google aurait clamecé, c’est une image… Vous me direz peut-être opportunément que la période moderne mérite à bien des égards d’être oubliée, mais une telle hypothèse parfois même espérée n’est quand même pas plus qu’une conjecture (un tel trou noir qui surviendrait) que l’on peut se permettre en présumant qu’elle est relativement extravagante. Je ne chercherai même pas à mettre au défi les envoûtés du progrès, de la marche forcée vers un avenir en fait réellement incertain basé sur une ancienne plaine entièrement élaguée, de se demander si, au cours de leur vie, leur point de vue radical du présent (quel qu’il soit) peut ou non évoluer, parfois jusqu’au regret futur d’avoir été peu éclairés dans leur première vie. Il me semble parfois que c’est bien pour avoir bien longtemps vécu déjà et seulement par la force inéluctable de la réalité que je me trouve un peu moins sot. Réactionnaire donc ?

      Réponse

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