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Tousse ensemble, tousse ensemble…

Par Agnès Maillard
11 mars 2016

manifIl fait tellement mauvais sur la place de la Libération qu’on croirait que le MEDEF s’est payé le ciel rien pour nous faire chier.

Déjà qu’on y est allé un peu à reculons. Pas seulement à cause du temps. Mais d’un autre côté, on ne pouvait pas ne pas y aller, ça aurait été comme dire : « Allez-y les gars, faites-vous plaisir, rétablissez directement le servage, plus personne n’en a rien à foutre de rien ! »

C’est plus profond que la grande saucée de 2010, quand on a battu pour rien le pavé pendant des mois pour refuser qu’on nous vole des années de vie et qu’on relance à pleine puissance la machine à fabriquer des vieux pauvres. Plus profond que le dégout permanent instillé par la politique de classe de ceux qui prétendent nous représenter et qui n’ont plus de socialistes que le nom, presque à regret, comme une maladie honteuse qu’on cache à de nouveaux copains dont on sait que l’amitié est douteuse et l’attachement une façade. Plus profond encore que la lente chute inexorable des 30 calamiteuses, les 30 honteuses, mais aussi les 30 revanchardes, selon si l’on se place du côté du manche ou de la cognée.

Ce n’est pas non plus un baroud d’honneur. Ça, c’était les retraites. Manière, comme j’ai toujours voulu le dire à ma grand-mère, il n’y a pas d’honneur quand on a les deux pieds solidement plantés dans la merde.
Il n’y a que la survie.

Ce n’est même pas de l’espoir. On sait que cela ne sert à rien. On sait pour l’essentiel que les syndicats eux-mêmes, poussés par les nouvelles règles de la représentation, sont devenus des machines à signer des accords, même scélérats, du moment que cela leur offre, à eux aussi, une respiration de plus dans leur longue agonie.

On a bien noté que dorénavant, pour les dominants, ce qu’il y a de bien avec les grèves, c’est qu’on ne s’en aperçoit même plus. Et qu’avec cette défaite organisée de la loi et du droit contre la domination du capital, bientôt, on ne verra ni n’entendra plus les travailleurs se faire broyer par la monstrueuse machine à faire toujours plus de fric.

Mais quand même, on voulait voir si une mobilisation citoyenne, décidée sans les organisations, les syndicats et tous les autres relais de la grosse machine à huiler les rouages, si ce type d’action était encore possible ou s’il fallait passer à autre chose.

Les patrons se plaignent que le Code du travail est trop contraignant.
C’est amusant.
C’est comme si les délinquants se plaignaient que le Code pénal soit trop contraignant !

Franck Lepage

La fête à Neuneu

La ville étouffe chaque jour un peu plus sous l’emprise des bagnoles. Bientôt, il faudra plus de temps pour se garer que pour venir du bled. Mais c’est encore une autre histoire.

Nous sommes encore à une bonne centaine de mètres de la place quand on entend ce qui nous évoque immanquablement un bruit de fête foraine. Il y a comme le brouhaha d’un gars avec une sono qui a l’air d’encourager son public à chopper le pompon de Mickey, une rumeur de foule et surtout une pénétrante odeur de baraque à frites.

Sur la place battue par une pluie froide comme une gifle de garde à vue, c’est un embouteillage de parapluies qui se pressent autour des inévitables drapeaux CGT et Solidaires. Je crois que c’est ça que je voulais voir : comment les syndicats, qui avaient juste programmé une balade de santé pour la fin du mois, se sont empressés de prendre le train en marche, de s’approprier notre colère et notre exaspération pour en faire un putain de barnum promotionnel.

L’animateur (parce qu’il faut bien appeler les choses par leur nom) encourage alors le public transi à s’ébrouer sur la musique de Téléphone et j’en vois qui se dandinent avec un certain enthousiasme. On aura au moins échappé à Zebda, un groupe que j’aimais bien jusqu’à ce que je me le tape en boucle au cul des sonos CGT pendant des mois, voir des années…

J’essaie au moins de croiser deux ou trois potes dans la foule, histoire de profiter de l’occasion pour échanger des propos politiques bien sentis, mais avec ma stature de hobbit, je me retrouve à perforer des côtes et des tétons. Comme me le dit Caro que je reconnais à son parapluie, lui aussi obstinément ancré sous la ligne de flottaison humaine, nous ne sommes même pas assez grandes pour éborgner les autres.

La foule tiendrait aisément au rayon frais de l’hypermarché du bled en chef et se serre les coudes autour du stand ventrèche et merguez opportunément placé là. On ne gêne personne, si ce n’est les deux malheureux flics qui doivent se sentir en surnombre.

C’est alors que l’animateur annonce qu’on va quand même se faire un défilé… mais à la hauteur de l’enjeu et de la mobilisation.

On va faire le tour du pâté de maisons.

Si, si, le tour du pâté de maisons.

Comme ça, on passera sous les fenêtres qui ne s’ouvrent pas de la CCI, au moment de la pause déjeuner des employés dont je suppose que personne ne sait qu’ils sont à présent eux aussi menacés par un grand plan de régionalisation et de rationalisation comme il y en a déjà trop, alors même qu’il parait que le Code du travail encore en cours est trop contraignant.

C’est une vaste farce, comme les élections et le reste. Nous sommes toujours plus furieux et l’on cultive toujours plus notre impuissance.

Jusqu’à quand?

24 Commentaires

  1. Avec la pluie ça pourrait être « pleure ensemble »…
    Caisse qu’y faut faire?… rien…
    Attendre que la situation devienne tellement pourrie qu’elle nous pète à la gueule. C’est ce qui arrivera.
    Compter sur les partis politiques? Ceux de droite, y compris le PS, je mange pas de ce pain là. Ceux de gauche? Ils sont à l’image des autres. Batailles internes pour le pouvoir, externes pour la suprématie sur les autres… Pour avoir essayé d’y apporter autre chose, je me suis rendu compte que le projet de devenir calife à la place du calife est toujours la motivation de ceux qui manipulent les outils de l’appareil. Alors basta! J’attends… je sais pas quoi vraiment…

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    • Si tout le monde attend, il ne risque pas d’arriver grand chose… surtout qu’en face, le patronat est impatient!

      Réponse
  2. (tiens) j’ai lu ça: « être de gauche demande trop d’efforts, à commencer par abandonner toute vanité »

    ..si pas une culture ni une humeur, alors un caractère, une nature ! (et) comment ferait une girouette ? ..aucune idée, ni concerné,

    je ne sais pas vous.. une p’tite pluie certes a qql charme, mais le temps je le préfère ensoleillé !
    (au-soleil ?! humm.. alors gourmand)

    Réponse
  3. « Vos processions, nos morts. » J’étais tenté d’écrire cela en titre de ma bafouille.

    Va falloir vite se souvenir du passé. Déchirer les chemises, occuper, casser, bloquer, séquestrer, revenir aux recettes à l’ancienne qui ont tant fait peur aux puissants. Et en finir avec les processions. Y compris agrémentée de drapeaux rouges.

    http://yetiblog.org/index.php?post/1671

    Réponse
    • D’ailleurs, tu as bien vu à quel point ils ont la main lourde pour ceux qui luttent pour de vrai?

      Réponse
      • Oh oui, les factures sont salées. Mais pourraient devenir immangeables. Se souvenir de Joe Hill ou de Sacco et Vanzetti par exemple. Et pourtant, quand on songe au passé, on voit bien qu’aucune avancée sociale n’a été arrachée dans une bagarre en dentelles…

        Réponse
  4. En fait, ni l’une, ni l’autre partie qui s’affrontent ne comprennent que couic au film qu’ils surjouent à grands coups de slogans périmés.

    Un dialogue d’aveugles très nazebrocs, mais marrant comme une foire d’empoigne.

    Réponse
  5. Le servage, c’est pas un cdi? Ben alors, jamais content les gens 😉

    Réponse
    • Aujourd’hui, ce serait plutôt un autoentrepreneur avec un seul client : son ancien patron.

      Réponse
      • C’est peut-être plus complexe, voire plus subversif…

        Depuis bientôt 10 ans, je ne travaille plus pour mon ex-patron, mais avec lui, associé, sa micro-entreprise impliquée dans la mienne. Il était le directeur général d’une filiale, et j’étais le responsable commercial. Les actionnaires l’ont éjecté, puis ce fut mon tour. Nous coutions trop cher et nous devenions sans doute trop vieux, et puis le business avait été développé. Nous avions démarré, lancé une aventure pour la faire passer de dix petits millions à 100 millions.
        Aujourd’hui, nous sommes devenus le meilleur ennemi de cette filiale et les meilleurs amis du monde : nous avons notre propre marque, mais nous vendons aussi la leur, que nous nous procurons en Pologne ou en Roumanie, avec des devis imbattables. Nous nous sommes structurés micros, chacun sa petite entité, et nous sommes désormais 6 petites entités, avec chacun son rôle, ses taches, ce que j’appelle l’efficacité commandos face à l’autre, la lourde armée de terre, notre ex-employeur et désormais concurrent.

        Mon jeune beau-frère, qui est grand patron, avec plus de 100 salariés, me dit parfois à table, qu’il se sent lui aussi en danger, demain, par l’ubérisation, d’une ou de minuscules structures capables tel un essaim de guêpes, de foutre tous ses plans business en l’air, qu’il peut lutter contre ses gros concurrents à égalité, mais pas contre des commandos, des invisibles dont il ne sait rien, qui peuvent se jouer de Schengen et frapper dans le dos.

        Vous pouvez manifester, tourner en rond, que vous finirez toujours dans le dialogue soit la trahison d’une façon ou d’une autre, que ce qui fait peur aux pouvoirs n’est point les révolutions mais la subversion.

        Réponse
  6. Cette manif était sans doute nécessaire pour enterrer ce type de rapport de force…
    Allez, un peu de fraîcheur dans un monde faisandé…
    http://www.laviedesidees.fr/Zomia-la-ou-l-Etat-n-est-pas.html
    Très utile pour déconstruire les mythes sur lesquels sont bâties nos impasses…
    Je viens de finir « L’éloge des frontières » de Régis Debray, également disponible en conférence sur Youtube, je recommande vivement…
    Je me rend compte qu’on a beaucoup fait appel à nos bons sentiments pour nous fourvoyer…

    Réponse
  7. « se sert les coudes »
    Avec de la moutarde ou de la harissa ?
    😉

    Réponse
  8. Je sais que je radote, mais j’ai l’impression qu’il n’y a que la violence qu’ils comprennent.

    Alors oui je sais… la violence entraîne la violence… blabla regarde Gandhi…. blablabla…. oui je sais crs ss, flic qui tapent (et éventuellement se défendent légitimement en tirant dans le dos – sur le mec qui courait à reculons pour le tuer), anti manif avec sniper sur les toits (ils ont prévu) mais à un moment, voter ne sert à rien, manifester ne sert à rien, se moquer ne sert à rien. Ils ont bloqué le système et modifient les règles au fur et à mesure pour rester en place et faire ce qu’ils ont envie de faire : contre le peuple, même contre leurs élus (en les menaçant de leur retirer leur circonscription).

    Je ne parle même pas des magouilles monstrueuses pour faire passer les produits des multinationales en ne faisant pas leur travail de contrôle pourtant obligatoire : tu ne peux pas écrire d’utiliser (et encore moins vendre) du purin d’ortie car il n’y pas de ‘preuve’ que ton produit marche et est stable, mais ils donnent leur autorisation à la vaccination par exemple avec le vaccin anti papilloma SANS aucune étude sérieuse indépendant, les chimio : 1 an de galère pour 2 mois de survie supplémentaire, les ogm sans danger mais qu’on ne veut pas écrire sur le paquet qu’il y en a…

    C’est une classe politique de mafieux, des truands vendus qui contrôlent la police, la justice, l’écriture des lois, la signature d’accords dans le plus grand secret…

    S’isoler dans un coin perdu ? ils contrôlent les taxes foncière habitation, ils obligent à l’intercommunalité (pour que le gros bled gère le fric des petits bleds), et si tu arrives à passer outre en te regroupant, ils te chassent en te traitent de secte. (ils écrivent les lois et commandent aux juges).
    Changer de pays ? déjà pas en europe, pas asie et urss, pas amérique du nord, l’afrique c’est un champ de bataille à cause des multinationales, l’amérique du sud, les usa ont vite fait de mettre en place des dictatures… je ne vois pas ou. Les pays nordiques ? le danemark confisque les bien des migrants (comme dans les camps nazi en fait).. et ces pays la langue est pas trop latine…. voila la barrière déjà. Et puis bon partir de chez toi parce que la mafia gouverne ça fait un peu mal là.

    [mode modération on] La provocation publique et directe, par tous moyens, à commettre un génocide est punie de la réclusion criminelle à perpétuité si cette provocation a été suivie d’effet. Si la provocation n’a pas été suivie d’effet, les faits sont punis de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende. [mode modération off]

    Réponse
  9. « on se traine un moral de vaincus »

    Voilà, ça fait froid dans l’dos mais c’est exactement ce à quoi les pouvoirs de tout temps aspirent à étendre toujours plus, toujours plus encore.

    La raison ? ah ah ah 😀
    Y’en a pas.

    Je rejoinds :

    il ne reste aucune solution contre eux

    Il s’agit de trouver des solutions pour nous, et non à leur ressembler
    [mode modération on] Désolée, mais là, je ne peux pas laisser la citation d’un propos qui nous expose à des poursuites au pénal, c’est dans la charte. [mode modération off]

    sinon à ne rien faire apparaître de nouveau dans cette foutue humanité qui est toute la nôtre, quoiqu’à ce que nous aspirions en faire…

    Réponse
    • Je comprends parfaitement… même si cela illustre malheureusement mon propos.

      Réponse
      • et je rajoute…. 7 ans de prison ? Pas à ce soucier du lendemain, pas à de soucier de ce que l’on va manger, pas à soucier de se chauffer, pas à se soucier de se loger…
        Nous sommes déjà dans une prison, sauf que les prisonniers peuvent mourir de froid l’hiver, peuvent mourir de faim tout le temps, peuvent être tués par un flic qui « se défend ». Oui on peut vadrouiller dans notre misère… sacrée liberté.

        Réponse
  10. chers occitans, los sans dentos per la revolucion social :
    j’ai lu toutes vos considérations sur l’espèce mais je m’en fous
    car
    la CGT est le syndicat qui fait peu au MEDEF.

    PEUR

    Réponse
  11. Valls et cie se donnent quinze jours pour faire de la pédagogie
    ils doivent nous confondre avec les Républicains qui font campagne pour les primaires alors que à l’origine les primaires du PS, ils avaient trouvé ça complétement cons.

    mais je vous le dis, les sans dentos ont des dents car il y a la sécu
    (ce qui n’est pas faux)

    on remet ça l’31
    (d’où l’expression)

    Réponse
    • les dents et la sécu c’est un peu le serpent de mer, tout le monde sait que les lunettes et les dents c’est la misère. Sauf que si tu prends des lunettes de merde cela te coûte presque rien (sauf l’anti reflet) pour les dents…. si tu as pas de pognon, tu as intérêt à avoir de la chance.

      Réponse
  12. la CGT fait peur au MEDEF… ce qu’il faut pas lire lol.

    Réponse
  13. les syndicats ? le premier problème avec les syndicats, c’est qu’ils sont adhérents de la confédération européenne des syndicats, et qu’ils sont financés par l’Union Européenne. Alors qui paye commande. Et l’ « Europe » on sait pour qui roule ce machin antidémocratique d’oligarques autoproclamés au service du grand capital et de l’impérialisme US.
    Alors quel le programme à suivre pour sortir de ce piège à rats, et dans quel ordre il faut s’y prendre, les priorités, c’est facile à trouver.

    Réponse

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