Ou quand le cœur se brise, littéralement…
Au début, c’est la grand-mère qui dépérit lentement de ce que l’on appelle toujours pudiquement une longue maladie. Il y a la famille, autour, qui se serre les coudes, les petits-enfants qui intensifient le rythme des visites, et tous les proches qui, lentement mais sûrement, se préparent à la fin inéluctable. Il y a les premières attaques, les aller-retour à l’hôpital. Il y a même de petites rémissions, qui ne rendent pas vraiment l’espoir, mais qui laissent l’angoisse relâcher son étreinte, un temps. Et puis, un jour, c’est fait, la grand-mère est partie. Peine et tristesse sont au rendez-vous, naturellement, mais voilà, depuis le temps, tout avait été prévu, mis en place, calibré : la veillée, la présentation, le repas familial, la cérémonie, les discours. On se soutient, on s’épaule et on entoure le veuf, drapé dignement dans sa douleur, calme, tout en sobriété.
Trois jours plus tard, le grand-père s’assoit sur son lit devenu si vaste, ce lit qui a vu s’épancher 50 ans d’amour et de complicité, au quotidien. Le chat que sa petite-fille a laissé, il y a longtemps, grimpe sur ses genoux, ronronne et appelle la caresse. Et il est mort, comme cela, tranquille et apaisé, comme une petite flamme arrivée au bout de son combustible. Ceux qui l’on vu, ensuite, racontent qu’il avait presque l’air heureux.
C’est marquant une histoire comme celle-là. Ce n’est pas ma famille, ce ne sont pas mes grands-parents, mais je pense sans cesse à ce vieux qui n’a pu continuer à vivre sans elle. Je ne pensais pas que de nos jours, on pouvait encore mourir d’aimer. Quelque chose au-delà du couple, des habitudes qui tissent leur réseau dense de gestes, de mots, de soupirs. Quelque chose qui fait que deux êtres finissent par fusionner sous la pression des décennies, d’une manière plus profonde, plus intime que ne pourra jamais le faire le feu intense de la passion amoureuse. Quelque chose qui fait que l’un finit les phrases de l’autre, sans même s’en rendre compte, qu’un regard signifie plus qu’un long discours. Quelque chose qui synchronise leurs émotions, leurs pensées, jusqu’aux battements même de leurs cœurs, comme s’il n’y avait plus qu’une seule flamme de vie pour animer deux vieux corps.
Ne t’inquiète pas pour moi, tu sais très bien que je te survivrais.
Je continue à le penser. Que je lui survivrais. Est-ce parce que nous aimons moins profondément? Parce que nous sommes plus jeunes? Parce que nous n’avons pas encore passé une vie ensemble? Ou peut-être, tout simplement, que nous ne sommes plus fait de la même matière, modelé dans le même terreau. Les deux vieux de mon histoire venaient d’un autre monde, d’un autre temps, du temps où l’on s’aimait pour la vie, non, même pas, pour l’éternité, du temps où le divorce était un péché, où l’on ne se débinait pas à la première difficulté, où l’on surmontait tout ensemble, y compris le désamour, celui qui vient avec le temps, l’indifférence, la vie qui use et qui polit les sentiments comme des galets dans un torrent violent. Ils venaient du temps où l’on ne se quittait pas, où l’on pouvait, certes, tomber amoureux de quelqu’un d’autre, mais où l’on trompait avec tact et discrétion, avant de toujours rentrer le soir, pour dîner, à la maison.
Autant tout le monde s’était préparé au décès de la grand-mère, autant celui du grand-père fit l’effet d’une déflagration sur une aire de pique nique. Tout le monde sait que ça arrive, ces couples qui se suivent dans la tombe, mais personne ne s’y attend. Je me demande encore si l’effet de surprise accentue le chagrin ou si cela vient plutôt de l’accumulation, de ce trop plein de larmes dont plus rien ne peut étancher le flot. En une petite semaine seulement, c’est toute une famille qui devient orpheline, c’est tout un univers qui disparaît, un monde de souvenirs, une maison qui se vide et dont on se détourne.
Il a fait une crise cardiaque a expliqué le médecin. Juste un cœur qui bat et qui s’arrête, comme une pièce qui plonge dans l’obscurité quand on en éteint la lumière en sortant. 70 battements à la minute, 4200 pulsations en une heure, plus de 700 000 raisons de lâcher prise après son départ à elle.
La vie qui s’arrête, comme cela, juste quand elle a perdu tout sens.
Et la vie qui continue, malgré tout, pour ceux qui survivent.
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Je te répondrai : c’est quoi, aimer? Ce n’est justement pas que la passion amoureuse du début qui embrase les sens et fait perdre la tête, c’est tout un ensemble de gestes, de souvenirs et de moments communs, quelque chose qui se tisse aussi au fil du temps et qui crée un lien puissant entre deux êtres. Je ne pense pas qu’il n’y a qu’une façon d’aimer, il y a surtout une multitude d’histoires qui s’entrelacent, se consolident ou se défont, il y a des étapes, des gradations, des nuances…
Que peut-on dire de l’alchimie qui lie les êtres après un demi-siècle d’histoire commune? Que peut-on seulement en imaginer, en ressentir? Y a-t-il des mots qui peuvent rendre compte de la nature de ces sentiments forgés sous les coups de la vie?
Cette histoire me hante parce que j’ai l’impression de contempler un mystère insondable, loin des certitudes et des petites phrases toutes faites.
Christine, qu’en sais-tu pour être si tranchante? Les habitudes, faut du temps pour les prendre. c’est pas tout le monde qui laisse aux habitudes le temps et la chance de s’installer. Les gens pudiques, c’est souvent comme ça qu’ils appellent l’amour. Il y a des habitudes qui tiennent chaud et on peut mourir de froid de les avoir perdues.
Mais Agnès, peut-être que ton vieil homme il serait mort avant, et qu’il a attendu, parce qu’elle avait besoin de lui, et aussi parce que c’était prévu comme ça, qu’elle partirait la première?
Mais ce n’est pas mourir d’aimer ça, c’est mourir de la perte d’habitudes.
Tact et discrétion, voilà ce qu’il manque aujourd’hui. 🙂
En fait, on dirait que ce couple a subi une amputation de la moitié. Alors à cet âge, une amputation…
Elle est belle ton histoire. rare aussi. J’ai connu un vieux couple comme ça quand j’étais petite, des fermiers. Envoyée par ma mère, j’allais chercher les oeufs. J’aimais bien y aller. Toute gamine que j’étais, je sentais une aura de complicité entre eux, une sérénité. Sans qu’on se soit dit grand chose, je sortais de là, apaisée, et ne pouvait m’empêcher de dire à ma mère "qu’est-ce qui sont gentils M et Mme M !". Ils étaient déjà vieux et ils ont vécu longtemps. Comme dans ton histoire, elle est morte d’abord et il l’a suivie rapidement. Je me suis dit "Pas étonnant".
A Christine : Il y a quelque chose de plus élevé que des habitudes.
Je ne parlerais pas d’habitudes.
Je parlerais de "façon de concevoir sa vie", de "comment on construit sa vie", de "fondements"…
Et que si on enlève un pilier, s’il tombe… tout s’écroule !
On peut aussi connaître cela avec la perte d’un emploi, aussi…
Ça dépend comment on a construit ça vie, comment on se définit…
Beau, juste, touchant.
Jardin :
"Il y a des habitudes qui tiennent chaud et on peut mourir de froid de les avoir perdues".
Il y a aussi que ce modèle ancien, où les partenaires sont contre vents et marées, un mutuel refuge, a parfois connu quelques vraies réussites, qui relèvent presque du mythe, maintenant … de l’"inespéré", quoi.
Ce n’est pas mourir d’aimer, plutôt en aimant, à l’heure qui va bien, et donc tranquille.
C’est quand-même pas mal, ça …
🙂
L’ histoire de mes grand-parents …!
A chaque couple son histoire, sa musique.
Mourir en amour par amour pour l’amour, ce fut le cas de mon grand-père, mais qu’est-ce qu’aimer?
Aimer l’autre ou s’aimer soi ou les deux à la fois? 🙂
Je lis souvent tes textes, toujours justes, souvent très beaux. Celui-ci me touche particulièrement car j’y crois à ça, du haut de mes 25 ans, à cette possibilité. Mourir d’aimer. C’est d’ailleurs ce qui me raccroche le plus à la vie. Dans ton incompréhension, tu me rappel quelqu’un. Qui m’a quitté. Peu après, sans aucune raison, j’ai été atteint d’une maladie du coeur qui n’a pas eu raison de moi. Je suis trop jeune encore. J’aurais eu 70 ans, j’y serais resté.
Elle me l’avait dit ça : "je te survivrais". J’avais eu mal car moi, je ne savais pas ce qu’il me serait arrivé si elle venait à mourir. Je n’avais pas et n’ai toujours pas cette certitude si protectrice. Je n’aime pas la rationalité dans les rapports amoureux, ça n’a rien à faire là.
Pas la peine d’aller chercher nos vieux pour y croire. L’amour n’est pas un fait social, il est autre, libre, jeune et n’a pas peur de l’avenir, comme de la mort.
Je n’ai pas foi en grand chose pourtant, mais en ça, oui, volontiers.
superbe texte, Agnès
en le lisant j’ai pensé à "La chanson des vieux amants" de Brel
"Mais mon amour
Mon doux mon tendre mon merveilleux amour
De l’aube claire jusqu’à la fin du jour
Je t’aime encore tu sais je t’aime"
http://www.youtube.com/watch?v=H1Dp…
que je ne peux pas écouter sans frissonner .
Oui, l’amour peut durer toute une vie, je pense aussi à André Gorz et son épouse Dorine
"Tu vas avoir quatre-vingt-deux ans. Tu as rapetissé de six centimètres, tu ne pèses que quarante-cinq kilos et tu es toujours belle, gracieuse et désirable. Cela fait cinquante-huit ans que nous vivons ensemble et je t’aime plus que jamais. Récemment, je suis retombé amoureux de toi une nouvelle fois et je porte de nouveau en moi un vide débordant que ne comble que ton corps serré contre le mien […] Nous aimerions chacun ne pas survivre à la mort de l’autre. Nous nous sommes souvent dit que si, par impossible nous avions une seconde vie, nous voudrions la vivre ensemble. »
(extrait de lettre à D., histoire d’un amour)
en 2007 il a mis fin à ses jours et à ceux de Dorine, gravement malade.
ça ne fonctionne pas toujours un couple, mes grands-parents ne s’aimaient guère, par contre mes parents, qui sont ensemble depuis qu’ils ont 15 ans, c’est à dire 60 ans, sont très très liés.
ça n’a pas plu dans la famille de mon père, on disait qu’il faisait "tout ce que ma mère voulait", ce n’est pas vrai, simplement elle l’a toujours poussé, à voyager, à devenir maire, à déménager, le moteur c’est elle, et lui, il le sait.
mais souvent l’amour dérange.
et puis, c’est vrai il y a des hauts et es bas, des moments de crise, des colères mais les relations fortes et longues, très longues, existent.
Le grand mystère de la vie à deux.
Quand tu y songes, tu te rends compte que c’est avec ton conjoint que tu passes le plus de temps. Tu vis avec tes parents 20 ans environ, le reste avce ton mari; Quand tu as passé autant de temps avec l’autre, ta moitié, que tu a vécu jour après jour, nuit après nuit, on devient inséparables malgré les difficultés de la vie. Car ils en ont vécu autant que nous si ce n’est pire, mais ils ont tout surpassé ensemble, plus ou moins.
Et quand au bout de 50 ans l’un part ? Autant la femme continue à survivre à son mari, autant l’homme, se laisse vivre bien après le décès de sa femme. raison éducative peut-être…va comprendre…
Très joli texte…
"mourir de la perte d’habitudes" (Christine)
Je me souviens d’un très vieux couple de mon village natal. Plus de 70 ans de vie commune. Je ne sais plus qui est parti le premier. Mais celui qui restait était si vieux que la famille n’a pas jugé bon de le conduire à la cérémonie mortuaire. Et la famille a constaté le décès du deuxième en revenant de cette cérémonie. Même pas eu le temps de perdre les habitudes…
Bonjour Agnès…et merci pour ce joli texte, sensible, à fleur de peau.
L’amour est indicible, on a beau se dire des "je t’aime" à gogo, ce ne sont jamais que des mots qui voilent des sentiments bien plus intenses.
J’ai vécu avec la même personne durant 17 ans. Nous nous aimions, étions très complices…et puis au fil du temps la source de notre amour s’est tarie, insidieusement mais surement, chaque jour un peu plus la lassitude s’est installée et nous n’avons su que faire pour l’enrayer. Nous nous sommes séparés et cela nous a permis de rester proches malgré le désamour…
Je crois que tu enjolives le passé lorsque tu dis que les anciens surmontaient les difficultés liées à la durée. Certes l’amour peut durer 50, 60 ans, toute une vie…mais il peut aussi se muer en indifférence, en mépris, en dégoût pour le corps de l’autre.
Avant, le poids de la morale était tel que, pour une femme en particulier, quitter un mari irrespectueux, infidèle ou bien qu’elle avait cessé d’aimer, était quelque chose d’ extrêmement délicat. Cela revenait à s’exposer à la vindicte populaire et à toutes sortes de ragots. Actuellement, nous sommes sans doute dans l’excès inverse, on se quitte pour un oui, pour un non. C’est affaire de respect mutuel, de sentiments vrais, de stabilité personnelle et que sais-je encore… En la matière, il n’y a pas de recette.
Bien à toi.
Pierre de Mars
" Tout le monde sait que ça arrive, ces couples qui se suivent dans la tombe, mais personne ne s’y attend. (…) En une petite semaine seulement, c’est toute une famille qui devient orpheline, c’est tout un univers qui disparaît, un monde de souvenirs, une maison qui se vide et dont on se détourne."
Je puis t’assurer que tu es dans le vrai. Il y a l’avant et l’après.
Ma mère est disparue brutalement trois mois avant mon père, gravement malade, alors qu’on ne s’y s’attendait pas. Illogique. Absurde.
Nos vies ne sont pas aptes à admettre des bouleversements aussi rapides. Tout devrait normalement se produire paisiblement, dans la durée, sauf que la vraie vie en décide autrement. Même si on sait que cela arrivera, sans échappatoire, cela semble si brutal, si absurde, qu’on en saisit enfin la finitude de nos existences.
Pas drôle, mais tellement humain.
" c’est avec ton conjoint que tu passes le plus de temps"
ah ben non, statistiquement, c’est plutôt avec ses collègues, quand on a la "chance" d’avoir un travail
brrrr…
quand je vois la tronche de certains de mes ex-collègues, je suis contente de m’être tirée
Si juste que deux de mes proches ont traversé cette epreuve récemment. En ce qui me concerne tout y est. L’attaque de la grand mère avec les espoirs et les déceptions, les visites des petits enfants, la maison qui se vide du fait des longs séjours en maison de repos, le papi si fort par le passé qui dévient de plus en plus perdu et le chat laissé par la fille qui dors au pied du lit. Très touchant. Bravo
S’il faut, Lucas, on parle des mêmes proches…
Ces morts consécutives ne touchent pas que les vieux .
Une jeune fille de 20 ans se tue en voiture .
Le père ne supporte pas et meurt quelques heures plus tard.
Une sorte d’attaque .
Avez vous déjà suivi un enterrement avec deux cercueils ?
Avez vous déjà été témoin d’une mise en terre de deux cercueils dans le même caveau , à quelques minutes d’intervalle ?
Moi oui .
La petite jeune fille était ma soeur et le père était notre père .
Comme quoi , mourir d’aimer n’a pas d’âge précis .
qui a dit qu’un couple c’est deux ?
maudit pour le couple que la trinité amène… DIEU
calcul accessible au couple; si il y a trois il y a deux
dommage que les futurs pacsés savent comptés
si ce n’est que des neurones-mirroir qui s’entrechoquent
pour celui la un couple c’est un avec de l’intelligence
pour celui la un couple c’est pas deux
et qu’en un disparait ……..
On trouvait que notre mère "grognait" un peu trop Papa. N’empêche que quand il est mort, vraiment usé, elle l’a suivi d’à peine deux ans, d’un cancer à l’utérus, alors que nous ne l’avions pas vue vieillir..
On a trouvé que ce n’était pas anodin, cette localisation… C’était l’homme de sa vie au sens plein du terme.
cela me rappelle la mort d’andré Gorz et de Dorine -sa femme- en septembre 2007..en fait, un suicide amoureux, de peur que l’un vive sans l’autre…une belle et terrible histoire d’amour, de 2 êtres inséparables jusqu’au bout…
extrait de "Lettre à D. Histoire d’un amour"
« […] Tu vas avoir quatre-vingt-deux ans. Tu as rapetissé de six centimètres, tu ne pèses que quarante-cinq kilos et tu es toujours belle, gracieuse et désirable. Cela fait cinquante-huit ans que nous vivons ensemble et je t’aime plus que jamais. Récemment, je suis retombé amoureux de toi une nouvelle fois et je porte de nouveau en moi un vide débordant que ne comble que ton corps serré contre le mien […] Nous aimerions chacun ne pas survivre à la mort de l’autre. Nous nous sommes souvent dit que si, par impossible nous avions une seconde vie, nous voudrions la vivre ensemble. »
…
«comme une petite flamme arrivée au bout de son combustible».
Rien à ajouter là-dessus.
:-))
Merci Pierre pour votre appréciation et j’écris sous mon vrai nom.
Mon père m’a appris hier qu’un couple de Montpellier vient de fêter ses 80 ans de mariage… un couple de centenaires, donc. Et bizarrement, cela m’a plutôt fait peur.
Merci Pierre pour votre appréciation et j’écris sous mon vrai nom.
Mon père m’a appris hier qu’un couple de Montpellier vient de fêter ses 80 ans de mariage… un couple de centenaires, donc. Et bizarrement, cela m’a plutôt fait peur.
Agnes Maillard, je ne sais pas si vous êtes un pseudo, mais je vous aime d’écrire de pareils articles.
Mon épouse et moi, avons fêtés nos 30 ans de mariage cette année-ci. L’amour, au jour le jour, est une chose complexe. C’est d’abord enchaîner sa vie à celle d’un autre être humain. Il y a une multitude de petits reproches que l’on fait à l’autre, mais dont on sait bien qu’ils tourmentent l’autre autant qu’ils nous tourmentent à nous-même. Alors on pardonne, parce que pardonner c’est reconnaître que l’on est aussi faillible que l’autre.
Et puis, il y a aussi ces petits regards inquiets que l’on jette à l’autre en catimini par délicatesse de peur qu’il se rende compte de notre inquiétude à son sujet.
Il y a aussi tout ces silences qui en disent bien plus que tout ce que l’on se dit et dont on connaît déjà tout le contenu lorsque par hasard on prononce le premier pour le dire.
"Je t’aime, moi non plus" disait Gainsbourg. Comme il avait raison. Ce n’est plus de l’amour, c’est de l’appartenance. Mon épouse fait partie de moi, comme je fais partie d’elle. Nous sommes intriqués au sens quantique du terme. Notre couple est une unité. Il est tellement inconcevable que nous ne disparaissions pas ensemble, que je frémis à l’idée que notre couple puisse se déliter.
Je t’aime, mon amour. Moi non plus, me répond-elle. Et nous ébauchons un sourire qui n’appartient qu’à nous, qui est fait de ce que nous avons réussi et raté ensemble.
Merci Madame Agnes
Pierre Meur,
Belgique
Agnes @25 : "Mon père m’a appris hier qu’un couple de Montpellier vient de fêter ses 80 ans de mariage".
Qu’est-ce qui vous fait peur ? Le plus terrible ce sont les premières années. Après, on prend de la vitesse et les années s’écoulent sans que l’on s’en rende compte.
Bizarrement, j’ai l’impression que le temps jusqu’à mon adolescence a duré plus longtemps que le reste de ma vie. Pourtant ma vie a été bien remplie.
Je n’ai pas de frayeur de la mort, mais je commence a y penser de peur de ne plus en avoir le temps. Pourtant, statistiquement, je devrais avoir encore 20 ou 30 ans à me taper. Le temps, passé 50 ans (j’en ai 54), passe à la vitesse d’un TGV.
Le temps est relatif. Quelle drôle d’affaire 🙂
Quel âge avez-vous ?
Pierre Meur,
Belgique
38 ans dont 21 de couple.
Le truc, c’est que l’humain n’est pas spécialement prévu pour les relations monogames de cette ampleur… voilà ce qui est inquiétant. Jusqu’à pas très longtemps, tu pouvais très honnêtement te marier pour la vie… vue que la vie d’un couple tournait autour de 10 ans, entre les grossesses qui tuent, les maladies qui ne se soignent pas, les guerres, les famines et autres joyeusetés. Ensuite, un veuvage digne et c’était reparti pour une deuxième, voire une troisième vie de couple, avec toujours les 3 ans de passion au démarrage et tout ça. Et même dans cette configuration, le sport national, c’était quand même le badinage discret.
D’où mon étonnement de la permanence du couple monogame alors que nous vivons clairement plusieurs vies…
38 ans dont 21 de couple.
Le truc, c’est que l’humain n’est pas spécialement prévu pour les relations monogames de cette ampleur… voilà ce qui est inquiétant. Jusqu’à pas très longtemps, tu pouvais très honnêtement te marier pour la vie… vue que la vie d’un couple tournait autour de 10 ans, entre les grossesses qui tuent, les maladies qui ne se soignent pas, les guerres, les famines et autres joyeusetés. Ensuite, un veuvage digne et c’était reparti pour une deuxième, voire une troisième vie de couple, avec toujours les 3 ans de passion au démarrage et tout ça. Et même dans cette configuration, le sport national, c’était quand même le badinage discret.
D’où mon étonnement de la permanence du couple monogame alors que nous vivons clairement plusieurs vies…
Agnès @27 : "Le truc, c’est que l’humain n’est pas spécialement prévu pour les relations monogames de cette ampleur".
Sans vouloir vous offusquer, je dirais que vous valez mieux que cette argumentation opportuniste. Vous regardez une réalité d’un autre temps avec le regard de quelqu’un d’aujourd’hui. Ce n’est pas très objectif.
Si on regarde notre société actuelle, les couples ne tiennent pas parce que les valeurs mises en avant sont contraires à une vie de couple. Aujourd’hui, "on est" en consommant, et le nouveau conjoint fait aussi partie de "l’offre" consensuellement admise.
Quand au sport national, le badinage discret, il sert d’exercice à ceux qui n’ont jamais compris qu’il y a plus de plaisir dans une femme (je suis un homme) que l’on déshabille des yeux (en esprit) plutôt que dans la réalité de la femme déshabillée. L’herbe est toujours plus verte dans un jardin que l’on ne connaît pas, mais le goût de l’herbe reste le même. Un coït reste un coït, malgré les acrobaties liées à la chose. Le plus intéressant, le plus amusant, c’est dans la tête que ça se passe. J’adore regarder les femmes que je trouve jolies, mais, bon Dieu, il ne faut surtout pas y toucher. C’est trop décevant.
C’est comme ceux qui voudrait changer la société parce qu’ils connaissent la société dans laquelle ils vivent. Changer la société, d’accord, mais pas en rasant tout à zéro (quoique l’épilation à ses charmes). L’instabilité n’est pas une vertu.
Et même, la sexualité, c’est autre chose que la performance. La peau de l’autre que l’on touche avec plaisir, c’est déjà de la sexualité. Lorsque je rejoins mon épouse au lit et que je me couche, je me love contre elle, et j’apprécie sa chaleur qu’elle m’offre généreusement pour réchauffer ma peau froide, j’apprécie le confort de ce qu’elle est devenue, et je sais que c’est pareil pour elle. Sa peau est toujours aussi douce, et elle m’en offre plus qu’avant. Toute la nuit, nous tâchons inconsciemment de garder le plus de surface en contact, et nous nous retournons de concert. La sexualité, c’est d’abord la recherche d’une harmonie.
Qu’aurions-nous à gagner à aller voir ailleurs pour reconstruire ce que nous avons mis des années à construire. Vous savez quand je trouve mon épouse la plus belle ? C’est après le saut du lit, les cheveux en bataille, les yeux gonflés, avec les plis de l’oreiller marqués sur le visage. On prend le café silencieusement, et je la regarde avec une concupiscence qui n’appartient qu’à moi. Après, elle prend sa douche, se maquille, met une bonne demi-heure à s’habiller, se déshabiller, remettre autre chose, etc. Mais, ça, ce n’est plus la femme avec qui j’ai couché. Ça, c’est ma femme pour les autres. La femme qu’ils doivent deviner, alors que moi je la connais.
Mais la sexualité, ce n’est qu’une partie de la vie de couple. Il y a tellement plus. Toute une histoire que l’on partage. Le fils que l’on a perdu (je n’ai pas envie d’en parler), et la fille que l’on a élevé et qui sort du nid familial. Lorsqu’on la regarde, on se sent minable, tellement elle est exceptionnelle. Un caractère bien trempé, une intelligence bien formée, une gentillesse et une tendresse sans égales pour tout ceux qu’elle approche, des talents incroyables qui percent de partout. Ma fille, c’est quelqu’un. Je pourrais en parler pendant des heures.
Merci, ma femme, pour nos enfants, pour tout ce que tu es, pour tout ce que tu m’as donné ces années durant. Merci pour le plus petit regard que tu m’accordes. Mon épouse et moi, nous nous sommes construit l’un l’autre, petit bout par petit bout, sans impatience. Aujourd’hui les gens redécouvre la vertu des énergies durables. Il y a longtemps que mon épouse et moi avons construit notre vie sur des valeurs durables.
L’humanité est construite sur la famille, l’autre, le conjoint, et puis les enfants, et les petits-enfants. Il faut d’abord réaliser une famille cohérente avant de croire que l’on est capable de réaliser une société cohérente.
21 ans de couple, Agnès ? Je vous en souhaite dix fois autant. Oubliez votre individu dans votre couple, et vous y gagnerez une nouvelle unité, une individualité plus grande encore.
Et puis, continuez d’écrire. J’adore ce que vous écrivez. Ça fait plus de dix ans que je traîne sur internet. Vous faites partie des dix personnes les plus intéressantes que j’ai eu à y découvrir. Je sais que vous accepterez ce compliment en toute modestie, parce que la modestie est inscrite dans ce que vous écrivez.
Pierre Meur,
Belgique
Agnès @27 : "Le truc, c’est que l’humain n’est pas spécialement prévu pour les relations monogames de cette ampleur".
Sans vouloir vous offusquer, je dirais que vous valez mieux que cette argumentation opportuniste. Vous regardez une réalité d’un autre temps avec le regard de quelqu’un d’aujourd’hui. Ce n’est pas très objectif.
Si on regarde notre société actuelle, les couples ne tiennent pas parce que les valeurs mises en avant sont contraires à une vie de couple. Aujourd’hui, "on est" en consommant, et le nouveau conjoint fait aussi partie de "l’offre" consensuellement admise.
Quand au sport national, le badinage discret, il sert d’exercice à ceux qui n’ont jamais compris qu’il y a plus de plaisir dans une femme (je suis un homme) que l’on déshabille des yeux (en esprit) plutôt que dans la réalité de la femme déshabillée. L’herbe est toujours plus verte dans un jardin que l’on ne connaît pas, mais le goût de l’herbe reste le même. Un coït reste un coït, malgré les acrobaties liées à la chose. Le plus intéressant, le plus amusant, c’est dans la tête que ça se passe. J’adore regarder les femmes que je trouve jolies, mais, bon Dieu, il ne faut surtout pas y toucher. C’est trop décevant.
C’est comme ceux qui voudrait changer la société parce qu’ils connaissent la société dans laquelle ils vivent. Changer la société, d’accord, mais pas en rasant tout à zéro (quoique l’épilation à ses charmes). L’instabilité n’est pas une vertu.
Et même, la sexualité, c’est autre chose que la performance. La peau de l’autre que l’on touche avec plaisir, c’est déjà de la sexualité. Lorsque je rejoins mon épouse au lit et que je me couche, je me love contre elle, et j’apprécie sa chaleur qu’elle m’offre généreusement pour réchauffer ma peau froide, j’apprécie le confort de ce qu’elle est devenue, et je sais que c’est pareil pour elle. Sa peau est toujours aussi douce, et elle m’en offre plus qu’avant. Toute la nuit, nous tâchons inconsciemment de garder le plus de surface en contact, et nous nous retournons de concert. La sexualité, c’est d’abord la recherche d’une harmonie.
Qu’aurions-nous à gagner à aller voir ailleurs pour reconstruire ce que nous avons mis des années à construire. Vous savez quand je trouve mon épouse la plus belle ? C’est après le saut du lit, les cheveux en bataille, les yeux gonflés, avec les plis de l’oreiller marqués sur le visage. On prend le café silencieusement, et je la regarde avec une concupiscence qui n’appartient qu’à moi. Après, elle prend sa douche, se maquille, met une bonne demi-heure à s’habiller, se déshabiller, remettre autre chose, etc. Mais, ça, ce n’est plus la femme avec qui j’ai couché. Ça, c’est ma femme pour les autres. La femme qu’ils doivent deviner, alors que moi je la connais.
Mais la sexualité, ce n’est qu’une partie de la vie de couple. Il y a tellement plus. Toute une histoire que l’on partage. Le fils que l’on a perdu (je n’ai pas envie d’en parler), et la fille que l’on a élevé et qui sort du nid familial. Lorsqu’on la regarde, on se sent minable, tellement elle est exceptionnelle. Un caractère bien trempé, une intelligence bien formée, une gentillesse et une tendresse sans égales pour tout ceux qu’elle approche, des talents incroyables qui percent de partout. Ma fille, c’est quelqu’un. Je pourrais en parler pendant des heures.
Merci, ma femme, pour nos enfants, pour tout ce que tu es, pour tout ce que tu m’as donné ces années durant. Merci pour le plus petit regard que tu m’accordes. Mon épouse et moi, nous nous sommes construit l’un l’autre, petit bout par petit bout, sans impatience. Aujourd’hui les gens redécouvre la vertu des énergies durables. Il y a longtemps que mon épouse et moi avons construit notre vie sur des valeurs durables.
L’humanité est construite sur la famille, l’autre, le conjoint, et puis les enfants, et les petits-enfants. Il faut d’abord réaliser une famille cohérente avant de croire que l’on est capable de réaliser une société cohérente.
21 ans de couple, Agnès ? Je vous en souhaite dix fois autant. Oubliez votre individu dans votre couple, et vous y gagnerez une nouvelle unité, une individualité plus grande encore.
Et puis, continuez d’écrire. J’adore ce que vous écrivez. Ça fait plus de dix ans que je traîne sur internet. Vous faites partie des dix personnes les plus intéressantes que j’ai eu à y découvrir. Je sais que vous accepterez ce compliment en toute modestie, parce que la modestie est inscrite dans ce que vous écrivez.
Pierre Meur,
Belgique
Pierre Meur dit…Et puis, continuez d’écrire. J’adore ce que vous écrivez. Ça fait plus de dix ans que je traîne sur internet. Vous faites partie des dix personnes les plus intéressantes que j’ai eu à y découvrir. Je sais que vous accepterez ce compliment en toute modestie, parce que la modestie est inscrite dans ce que vous écrivez.
Ton plan drague à échoué mec, tu l’as fait partir !!!!!!!