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Le pas précipité de la donzelle

Par Agnès Maillard
9 septembre 2009

Ça y est, j’ai des devoirs, j’ai des devoirs ! Ma grande petite bonne femme jaillit du bus de ramassage scolaire comme un petit diable tout en traînant son cartable à sa suite, trop grand et trop vide.


Le petit chaperon roseElle ne saura rien du fond de ma pensée sur les devoirs pour les enfants de primaire et des inégalités sociales que cette pratique barbare creuse jusqu’au point de non-retour. Ma gosse joue à la grande et trottine déjà vers la maison. Cette année est purement révolutionnaire pour elle, mais aussi pour nous, toujours abonnés à l’école des parents. Fini la classe des bébés, avec le CP, les choses sérieuses commencent enfin.

Je suis ma grande petite bonne femme sur le chemin vaguement goudronné qui nous tient lieu de route. Toute mon attention est captivée par le ballet hypnotique de ses petites gambettes fluettes qui tricotent frénétiquement dans la chaleur lumineuse de cette fin d’été. J’aime ces petits mollets fuselés et graciles qui portent ma fille dans son insatiable conquête du monde, ces petites guiboles agiles, toujours trop longues pour ses robes qui oublient régulièrement de grandir avec elle. J’aime son appétit immense d’avancer, d’apprendre, de vivre. J’aime aussi qu’elle soit à ce point différente de moi, de mes obsessions, de mon histoire. Ma fille m’est parfaitement étrangère et c’est peut-être pour cela que je prends autant de plaisir à la fréquenter, jour après jour. Je ne cherche rien de familier dans ses traits, dans ses mimiques, dans ses mots, dans ses rires et ses grandes bouderies. Nous avons peut-être notre enthousiasme féroce en commun. Et toutes ses années, passées à grandir ensemble.

  • Et sinon, tu as appris quelque chose, aujourd’hui, à l’école ?
  • Oui, ça y est, je sais lire
  • Ha ben, dis donc, ça n’a pas traîné au moins !
  • Ouais, c’est super fastoche ! Tu vas voir.

La lecture ! La grande affaire pour la gosse. La grande affaire de toute une vie, ensuite. S’ouvrir à tout un monde nouveau et immense qui était déjà là et auquel on n’avait pas accès. Avec un brin de cérémonial, elle ouvre son petit cahier tout neuf sur la table de la cuisine et me montre les 4 phrases de lecture du jour. Elle est toute fière de sa prestation quand je remarque que son index, censé souligner les mots qu’elle doit déchiffrer, les cache en fait. Elle récite, mais ne lit pas. D’un autre côté, je sais que c’est normal en début de CP. Je la laisse donc débiter son texte les 5 fois réglementaires et la félicite chaudement.

Nous profitons de l’heure magique où le soleil colore d’ocre notre paysage bucolique pour nous occuper de notre modeste jardinet. L’autre jour, l’Ours est passé avec sa petite famille et s’est payé ma fiole abondamment au sujet de notre foutue tentative potagère. Je crois que c’est ça mon talent : je suis une bonne tête de Turc. J’enquille les conneries et les bévues comme un Pierre Richard de la grande époque sous ecsta et le récit d’une de mes journées ordinaires devient un film comique qui dériderait un congrès de veuves corses. Je fais toujours tout de traviole, mais je le fais avec une belle conviction sans faille et je finis toujours dans un grand climax dérisoire et amusant. Et puis, finalement, n’est-ce pas là un don précieux que celui de pouvoir faire rire les gens que l’on aime ?

Toujours est-il que nous nous escrimons depuis des mois à arracher à la terre trop basse quelques légumes savoureux, forcément meilleurs que ceux que l’on achète au supermarché, ne serait-ce que par le temps et la constance que l’on y a investis, jour après jour. La gosse fait semblant de venir arroser les pieds de tomates avec moi. En fait, elle galope dans l’herbe tout en jouant à se faire peur avec le panache d’eau tiède qui est censé abreuver la terre desséchée par une journée trop chaude. Trois gouttes dans le cou et elle détale en hurlant de joie et de surprise.
Nous avons repiqué nos semis de tomates un peu tard et c’est donc maintenant que les tiges ploient sous le poids des fruits en train de mûrir. L’un d’eux a carrément brisé un de ses trois tuteurs de bambous et rampe lamentablement dans la poussière que je suis en train d’humecter à grands jets. Je demande à ma fille d’aller prévenir son père du désastre et c’est au bout de sa course que je l’entends avec délice hurler un énième morceau de poésie enfantine, ce talent qu’elle partage avec moi de créer des mots là où l’usage et l’Académie française ont oublié d’en fournir de plus appropriés :

  • Papa ! viens vite, on a un tomatier qui vient de s’effondrer !
Le pas précipité de la donzelle 1

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30 Commentaires

  1. Bonjour,

    Je fais mes premier pas ici. Oh, mon CP est loin mais je suis ravi de ma lecture du jour.

    Délicieux moment parfaitement restitué. Bravo.
    🙂

    Réponse
  2. Quel don !
    Savoir saisir pleinement chaque moment de vie, chapi chapô !

    Réponse
  3. ""Comité de relecture :
    Après délibération, il apparaît que l’écriture d’abreuvé est impropre à l’usage tel qu’indiqué par l’Académie Française, et qu’il est préférable d’écrire un infinitif de manière correcte, soit non conjugué.""
    P.S. : Avec tous nos encouragements à employer des virgules après le 183e mot d’une phrase 😉

    Et pour être plus sérieux, c’est un très beau moment partagé, merci infiniment d’alimenter les envies d’enfant de mon amoureuse et moi-même…

    Réponse
  4. Un délice.
    Merci Agnès.

    Après 4 enfants, je suis toujours aussi épaté qu’en 2 ou 3 mois un tel monde s’ouvre à eux par l’intermédiaire de l’apprentissage de la lecture. Je prends toujours ça pour un petit miracle.

    J’avais un voisin qui avait installé des plants de tomates; sa fierté, qu’elles soient plus grosses et plus belles que celles trouvées sur le marché ou à Carrouf. Pour cela il les abreuvait d’engrais de pesticides et de produits, naturels ou non, de toutes sortes. Il était ‘achement fier d’exhiber de grosses tomates bien rouges, sans tache mais pleines d’eau et sans saveur. Il avait l’impression qu’elles étaient très saines parce que non issues de la culture intensive.

    Réponse
  5. Et est-ce que tu récupères les graines de tomates, pour l’année d’après ?
    Récupérer comme il faut, j’entends, comme :
    http://www.terrevivante.org/413-fai

    Réponse
  6. la lecture, c’est le meilleur cadeau qu’on puisse faire aux gosses, c’est l’outil qui leur servira à se faire leur propre opinion au lieu de se contenter de la bouillie prémachée par la télé.

    concernant le jardin, j’ai des plants sur le balcon, et effectivement la première année on se plante pas mal.. mauvais dimensionnement des pots, plantage trop tardif, tuteurage merdique… je ferai mieux l’an prochain.

    m’enfin, ça pousse quand même, mes tomates sont savoureuses (avec des semences de chez kokopelli), poivrons aussi même si je ne recommencerai pas, pas assez de rendement avec 1.5 poivron par pot… les aubergines, bien que fort belles, ont pour l’instant la taille d’un gros cornichon, je doute qu’elles atteignent la taille requise avant noël…

    en tout cas, les tomates cerises "du jardin", ça claque à l’apéro.

    Réponse
  7. Pour tes tomates, c’est peut être normal. Certaines variétés sont plus tardives que d’autres. Reste que vous êtes quand même bien au sud et que l’ensoleillement aurait dû aider à leur maturation. Un peu de purin d’ortie dilué sur les pieds au moment du repiquage aurait boosté leur pousse.

    Sinon c’est vrai que les tomages de jardin, quand y a goûté on en refait chaque année !
    http://www.ecologie-blog.fr/wp-cont
    (je sais, ça manque de pdc)

    Réponse
  8. La pauvreté de l’équipement informatique standard des écoles y est sûrement pour beaucoup. Là aussi, mieux vaut avoir des parents geeks qui t’ont offert ta bécane sous Linux pour tes 3 ans avec logiciel G Compris déployé pour maîtriser toutes les subtilités du clicodrôme que de compter sur l’Éducation (de moins en moins) Nationale pour pourvoir à ta culture informatique.

    Je sais que l’École n’est plus ce creuset républicain où se diluent les inégalités sociales et se forge l’avenir de la Nation méritocratique. Le destin scolaire des enfants est très fortement corrélé au niveau d’études atteint par la mère et à la capacité de paiement du père et c’est tout. Comme dans toute course à l’échalote, il y a ceux qui ont un ticket pour l’ascenseur express et ceux qui devront passer par la corde à nœuds. Et comme tout sale parent égoïste, je compte faire tout ce qui est en mon pouvoir pour que ma gosse passe entre les mailles du filet à trier les destins scolaires en fonction du milieu social d’origine!

    Réponse
  9. La lecture, oui…
    Mais, ce qui est étonnant par contre c’est que, il me semble que, la dactylographie n’est toujours pas enseigné. Alors qu’on n’a jamais autant utilisé de claviers ! Surtout, la dactylographie, c’est le genre de chose qu’on commence et qu’on ne fait ensuite pas sérieusement… et ça revient chaque année : "cette fois-ci je vais jusqu’au bout", et on finit par trouver de bonnes raisons pour ne pas finir (autres choses à faire, etc.)

    Réponse
  10. "Comité de relecture : Après délibération, il apparaît qu’il est préférable"… d’accorder le participe passé lorsque le complément d’objet est placé avant ! Attention ça pourra être utile à "la gosse" !! :-))

    Ex : "ne serait-ce que par le temps et la constance que l’on y a investiS"…

    Sinon, ma question sérieuse est : "Avec un talent pareil, avez-vous écrit des romans, ou des nouvelles, et dans le cas contraire : qu’est-ce que vous attendez ?"

    🙂

    Réponse
  11. Joli billet, chère Agnès !

    Ta fille qui sait lire au bout d’une journée est une optimiste …
    A l’inverse, je connais un garçon de son âge à qui on demandait, le soir du premier jour : "Alors, t’as fait quoi à l’école ?", et qui répondait : " Bof, pas grand chose ! Faut que j’y retourne demain …"
    🙂

    Réponse
  12. Merci Stella Star, j’avais trop honte de l’avoir publié avant de m’être personnellement relu… remuer le couteau est une joie sans nom 😉 et je l’ai bien mérité. L’arroseur arrosé…

    Je m’associe à la nouvelle question : romans, nouvelles, projets ? Vous auriez largement plus de choses à dire que bien des écrivains à succès, et peut-être même une toute autre hauteur de vue.

    Et surtout, vous auriez bien des lecteurs…dont je ferais partie avec grand plaisir.

    Réponse
  13. J’écris sous licence creative commons, donc tu peux prendre ce que tu veux à condition de ne pas déformer mes propos, de citer tes sources et de ne pas te faire de fric sans mon accord.

    Et merci pour ton appréciation! 🙂

    Réponse
  14. Texte magnifique, si simple qu’il semble avoir été écrit comme on respire. C’est ça le vrai talent!

    J’y suis particuluèrement sensible car j’accompagne en ce moment des enfants du voyage dans leur entrée au CP, ou plutôt, leur non rentrée pour le moment, pour cause de vendanges, de problèmes de voiture… grippe H1N1…etc…
    Ils arriverons plus tard, pas avant d’avoir manqué des dizaines d’heures de lecture …

    Je lirais bien ton texte d’une première journée au CP de ta fille, lors de nos réunion avec la commission scolarisation du schéma départemental d’accueil des gens du voyage du département où je vis, tant il illustre à merveille le gouffre qui sépare à l’entrée au CP un enfant issu d’une culture écrite et un enfant issu d’une culture orale, pour défendre un projet de bibliobus se déplaçant sur les terrains de vie des voyageurs, que personne ne veut financer.
    Je montrerais bien aussi la photo de ta fille, pour illustrer comme c’est sympa quand on nage comme un poisson dans l’eau en arrivant au CP!

    Ta fille est MAGNIFIQUE, et bien sûr je ne parle pas que de la beauté physique, mais de l’ensemble de la donzelle dans son insatiable conquête du monde…

    Alors, autorisée ou pas, si je cite la source, l’auteur, le blog?
    ça serait la révolution dans ce genre de réunion où il y a tout ce que tu peux imaginer de travailleurs sociaux et responsables territoriaux, dont je ne fais pas partie, je précise…

    Réponse
  15. Merci!
    Mais, que je te rassure , gagner du fric avec ce genre de projet, ça se saurait!
    Il s’agit juste d’introduire des propos et constats liés aux enfants du voyage et à leur situation dans l’école, lors d’une réunion…
    A part ça, si la CAF ou le conseil Général ou la DASS ou l’Inspection Académique veulent récupérer ton texte pour le diffuser, je les mets en contact avec toi! Promis!
    La citation s’arrêtera à : "Je la laisse donc débiter son texte les 5 fois réglementaires et la félicite chaudement."
    Même si la suite est toute aussi appréciée par moi!

    Réponse
  16. Superbe billet! On prend un plaisir fou à le lire et on envie cette relation mère-fille.

    Merci à toutes les deux 😉

    Réponse
  17. De la grande Agnès, comme d’habitude, mais c’est une habitude dont je ne me lasse pas. Si le petit encart "Soutenir le Monolecte (Agnès) – Faire un don", n’existait pas déjà, je lui dirais de le rajouter.

    C’est quoi déjà le sujet ? Ha oui, les petites guibolles qui s’agitent frénétiquement, les gosses, l’ogre scolaire, le destin incertain, le jardinage (?), et à nouveau les rires d’enfant.

    Je n’ai pas vraiment partagé la grossesse (il y en eu deux, mais je ne parlerai pas de la première) de mon épouse. C’était comme un objet virtuel. Par contre la naissance a été un choc bienheureux. Je me rappelle la sage-femme qui me courrait derrière pour que je prenne ma fille dans les bras, et moi qui m’enfuyait en tremblant de tout mon être à l’idée de la laisser tomber. J’ai vraiment été pitoyable.

    Ensuite, ces yeux qui ne voient rien mais qui vous cherche tout de même. Les petits doigts qui s’emparent du vôtre. Les tétées goulues dans un bruit de déglutition et de respiration à faire trembler les murs de la maison. Des sourires à vous décrocher le cœur, et des pleurs à vous le décrocher aussi. La pisse et la merde que l’on apprend à relativiser, surtout parce que tout ce qui vient du mouflet est béni.

    Oh, et le moment du bain. Les petites mains qui tremblent convulsivement et le visage crispé, au contact de l’eau.

    Et puis les déchirements de vos entrailles quand il faut déposer la gamine chez la gardienne parce qu’il faut bien travailler, et les grosses larmes qui nous sortent des yeux au volant à l’idée que la gardienne soit un monstre, et que même sans savoir parler, le petit bout hurle des "maman, papa". Alors on fait demi-tour pour s’assurer que tout va bien.

    Ensuite, ça galope à quatre pattes, et ça explore. Vous la mettez dans son trotteur, et elle se prend pour Fangio. Ça empire encore quand ça commence à se tenir debout. Les premiers pas et les parents bouleversés de bonheur.

    Futurs pères, réjouissez-vous, car le premier mot que les enfants disent, c’est "papa". Chez nous ça c’est passé de la manière suivante : Babou a réussi à escalader son lit et à en sortir, ensuite, elle a enlevé son lange, et a été faire ses besoins sur son petit pot. Ensuite, elle a appelé "papa", et nous sommes accouru ventre à terre. Elle était la debout, tenant son petit pot et en chantant "papa, papa". Mon épouse qui est de mauvaise foi, comme toutes les mères, a soutenu que la petite voulait dire "caca, caca". Quelle ignominie !!

    Bon, la suite, pour les jours qui viennent. Je sens que vous aller devoir me supporter encore plus que d’habitude. Quand je parle de mon enfant, il est impossible de m’imposer un bâillon-pampers (je vous la raconterai, celle-là, elle est trop drôle).

    Juste pour dire que demain, c’est-à-dire aujourd’hui, ma fille va emménager dans son premier appartement (elle a eu les clés, hier), et comme je suis en congé le jeudi, on va dévaliser le magasin y-a-ka (pas de marque) et passer toute la journée à monter ses premiers meubles. Ça va nous coûter bonbon, mais on s’en fout. Déjà qu’elle nous pique tout ce qu’elle aime à la maison, et nous on se laisse dévaliser avec ravissement. On est des parents-pélicans qui se laissent bouffer les entrailles.

    Petite question : la photo, c’est ta fille ? C’est le portrait de sa mère.

    Réponse
  18. Elle est adorable, ta gosse. (Presque) aussi belle que mon petit-fils, qui lui aussi entre en CP.

    Tu vois toujours tout en noir: si le tomatier (ohé, les académiciens?) casse ses piquets, c’est que la récolte est superbe, non? Mes piquets à moi sont des fers à béton de deux mètres de long. Oui-oui, les mêmes que (chut). Avantages nombreux, ils ne gardent pas les virus d’une année sur l’autre, sont quasiment indestructibles, se fondent admirablement dans le paysage, ne cassent pas sous le poids des fruits et se plantent assez profond sans trop d’efforts vu leur minceur.

    Pour le reste de la récolte, elle est très goûteuse, mais ridicule en quantité chez moi. Sauf pour les potirons, plus gros et plus nombreux que d’habitude. Et les tomates, qui ne cassent pas les piquets, mais s’écroulent quand même, trop foisonnantes pour être bien attachées.

    Réponse
  19. @Agnes : Quelle méthode de lecture ? Moi j’en ai bavé avec Justine, en fait en général tu ouvres la première page et quand tu lis untel maître d’application, untel prof à l’EN et aucun instit tu peux pleurer … Total Don Juanito ahonne encore en CE1

    Réponse
  20. @ Pierre Le Meur: "ces yeux qui ne voient rien mais qui vous cherche tout de même":

    Il y a environ 25 ans que "le grand public" devrait savoir que les bébés voient à la naissance et même avant. Pas très loin, pas très "large", mais bien assez pour trouver et SUIVRE le regard de qui veut bien les regarder de près, au sens propre comme au sens figuré.

    Réponse
  21. Bienheureuses contrées où les tomatiers s’effondrent sous le poids des fruits en train de mûrir.
    Sous d’autres cieux, d’autres altitudes, des enfants non moins charmants se désespère de ne PAS voir les tomates mûrir, sous serre…
    Belle tranche de vie, merci …

    Réponse
  22. Chère Agnés,

    Je suis èpatè. C’est plein de tendresse ton billet.

    Et comme je ne résiste pas à jouer au moralisateur et au donneur de leçons, permets que je te cite une phrase (mais ta fille est un peu jeune) que j’ai rabaché à mes propres enfants et qui, finalement a atterri sur une feuille collée dans les chambres de mes deux filles:

    "Je suis homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger"

    Phrase du poète latin Térence.

    Avoues que ça ouvre des perspectives et Dieu sait que nous en avons besoin ces temps-ci. Bonne chance à ta fille.

    J’aime aussi beaucoup le commentaire de B.L.

    " je connais un garçon de son âge à qui on demandait, le soir du premier jour : "Alors, t’as fait quoi à l’école ?", et qui répondait : " Bof, pas grand chose ! Faut que j’y retourne demain"

    A bientôt

    Cincinatus

    Réponse
  23. « Ma fille m’est parfaitement étrangère et c’est peut-être pour cela que je prends autant de plaisir à la fréquenter »

    Très belle phrase, qui résume parfaitement le sentiment que j’éprouve pour ma fille depuis sa naissance, et dont c’est l’anniversaire aujourd’hui. 🙂

    Réponse
  24. 19 Cincinatus

    « une phrase (mais ta fille est un peu jeune) que j’ai rabaché »

    Accusatif : accord !
    rabâché_e_

    Réponse
  25. Rhooooo, le joli néologisme que voilà! Adopté! Merci 😀

    Réponse
  26. @ Pierre Meur

    La photo, c’est Minilecte…

    Réponse
  27. Oui, ça fait quand même du bien!

    Réponse
  28. « Aidez-moi, aidez-moi !! ». Ce cri déchirant, c’était celui de Babou qui arrivée sur la digue, voyait la plage et la mer pour la première fois. Elle essayait d’arracher ses vêtements et n’y arrivait pas.

    Nous sommes une famille qui aiment raconter des histoires aux enfants. Ainsi, moi, j’étais le chevalier blanc. Je lui racontais les batailles que j’avais mené pour sauver le monde. J’avais un cheval blanc, une belle cape toute blanche, une belle épée, et une armure bien huilée qui blinquait. À force de raconter les histoires du chevalier, de chanter les chansons du chevalier blanc, Babou m’a demandé si le monde n’était plus en danger, et où je pouvais bien avoir rangé mon armure et tout le reste. Alors, j’ai sorti ma canne-épée du dessus de la bibliothèque, et l’épée de son fourreau. Si vous avez déjà vu un gosse épaté, vous auriez dû voir Babou. J’ignorais que les enfants pouvaient ouvrir des yeux aussi grands. Bon, pour l’armure, je vous donne le truc. Je lui ai dit que l’armure se trouvait au nettoyage à sec, et qu’il fallait beaucoup de temps pour la nettoyer, surtout à sec.

    Bon, les histoires pour dormir, c’était plutôt ma femme. Chaque fois que j’ai essayé de lui raconter une histoire pour l’endormir, je me suis endormi avant elle. Par contre, je connais tous les dessins animés et les génériques. Je finissais même par y être aussi accroché que Babou. Il m’est arrivé plusieurs fois d’allumer la télé le matin, quand la petite dormait chez ses cousins. Alors j’appréciais en connaisseur tout en sirotant mon café.

    Babou a deux cousins qui ont un et deux ans de plus qu’elle. On jouait ensemble à "Petit Pierre". Ça a commencé parce que Babou m’avait demandé de lui raconter l’histoire la plus triste que je connaissais. Alors, j’ai commencé : "Petit Pierre, il n’avait pas de maman, il n’avait pas de papa. Il marchait à pieds nus dans la neige et il avait très froid". Comme je faisais les yeux de chien battu, et la lippe pendante, Babou m’a donné un coup de poing dans le ventre en me disant "Arrête de faire ça". Là-dessus, j’ai fait le cri du goret qu’on égorge, et, bien entendu, elle a eu un fou-rire comme elle n’en avait jamais eu. Ses deux cousins sont arrivés un peu plus tard, et Babou leur a dit : "venez, on va jouer à petit Pierre". "Papinou, fais petit Pierre". Je m’exécute, et vlan, je me fais exécuter aussitôt. Les cousins ont trouvé ça très drôle aussi, et m’ont roué de coups. Je déconseille ce jeu aux parents. Ce n’est pas que les gosses tapent très fort, mais ils tapent longtemps, et il y a une petite lueur de jouissance sadique qui s’allume dans leurs yeux.

    La suite au prochain numéro.

    Réponse
  29. Les tables de multiplication : "par cœur" ou "comprenette" ?

    Imaginez un beau jour de fin d’été, dans une classe de Grande Section (6 élèves), Cours Préparatoire (9 élèves) et Cours Élémentaire 1° année (5 élèves), tout ce petit monde face à leur instit’ qui tient dans la main une boîte opaque et a près d’elle une énorme caisse remplie de bûchettes colorées. Celle-ci leur dit :
    "Regardez, je mets deux fois une bûchette dans la boîte et je la secoue. Vous entendez mes bûchettes ? Qui peut me dire combien il y a de bûchettes dans cette boîte ?
    – Deux ! Y’en a que deux ! crient deux petits de Grande Section qui n’ont pas encore intégré la règle de base de la classe (on lève le doigt et on attend que la maîtresse nous choisisse pour répondre).
    – Oui, j’ai mis deux fois une bûchette dans la boîte, une et encore une, donc il y a bien deux bûchettes dans la boîte (la maîtresse ressort les deux bûchettes de la boîte et les montre à bout de bras, les deux zozos se rengorgent, tout fiers de leur savoir).
    Mais la maîtresse reprend déjà :
    – Attention, plus difficile maintenant, nous allons voir qui sait vraiment compter ! Je vais mettre deux fois deux bûchettes dans la boîte (déjà les CP et les CE1 se trémoussent sur leurs chaises, le doigt levé, en poussant des cris de souris), regardez bien les petits (surnom affectueux du groupe des GS), deux et encore deux, deux fois deux bûchettes (chez les petits, les fronts se plissent, ils lèvent péniblement deux doigts et encore deux doigts, ce fichu auriculaire ne veut pas rester baissé et se lève en même temps que l’annulaire, ils le maintiennent avec le pouce de l’autre main et comptent leurs doigts avec leur menton, puis lèvent le doigt, soulagés : ils savent).
    Comme nous ne sommes qu’en tout début d’année, nous nous arrêtons après "deux fois quatre", les CE1 et certains CP sont un peu dépités, c’était bien ce jeu, et eux, ils connaissaient les réponses jusqu’à… beaucoup plus loin.
    La maîtresse annonce néanmoins aux CE1 qu’à partir de maintenant, normalement, ils n’ont plus besoin de recompter sur leurs doigts car, l’ayant déjà fait en GS et au CP, ils doivent maintenant le savoir par cœur, c’est à dire que le résultat doit s’afficher dans leur tête dès qu’ils entendent ou lisent "2 fois 1 ; 2 fois 2; 2 fois 3 ou 2 fois 4". Après un court contrôle oral, dans le désordre bien sûr, la classe passe à autre chose.

    Le lendemain, même heure, même public, même installation. Mais cette fois, la maîtresse raconte, tout en dessinant au tableau :
    "J’ai deux petits-enfants, un petit garçon et une petite fille, et j’ai cueilli deux pommes sur mon pommier. Je voudrais donner la moitié de ma récolte à chacun de mes deux enfants."
    Un petit GS lève le doigt et vient expliquer : "Tu fais un trait là, au milieu et tu donnes cette pomme à ta petite fille et celle-là à ton petit garçon.
    – Tout le monde est d’accord ? La moitié de deux pommes, c’est une pomme pour chacun ? Nous continuons, j’ai aussi acheté quatre sucettes, combien pour chacun ?

    Nous continuons ainsi jusqu’à huit petites voitures.

    Puis les CE1 montrent à leurs jeunes camarades comment s’écrivent les opérations que nous venons d’effectuer : 2 pommes : 2 = 1 pomme; 4 sucettes: 2 = 2 sucettes ; etc. tout en commentant ce qu’ils écrivent : "2 pommes partagées entre deux enfants, c’est 1 pomme pour chacun ; 4 sucettes partagées entre deux enfants, c’est 2 sucettes pour chacun."

    Bientôt, nous aborderons la table de trois jusqu’à "trois fois trois… neuf" puis nous finirons la table de deux et, un peu plus tard, la table de quatre. A Noël, ils sauront aussi la table de cinq.
    Lors du deuxième trimestre, nous verrons les tables de six, sept et huit, puis le troisième trimestre sera consacré à la table de neuf et à des révisions des tables à travers des exercices de calcul mental (multiplication et division), des séries d’opérations et des problèmes.

    Nous aurons "construit" une à une toutes ses tables avec "l’aide" des GS et des CP (ceux de l’an dernier ont fini l’année en connaissant "par cœur" les tables de 2 à 5, certains connaissaient aussi les résultats des tables de 6 à 9).
    S’ils sont comme leurs camarades des années précédentes, ils auront "compris le principe" bien avant que nous en arrivions à la table de neuf et annonceront tout fiers : "Oh ! La table de sept, c’est fastoche ! On n’a que "le" "sept fois sept", "le" "sept fois huit" et "le" "sept fois neuf" à trouver ! Tous les autres, on les sait déjà ! La plus fastoche, c’est la table de neuf, on n’aura que "le" "neuf fois neuf" à apprendre et moi, je l’ai déjà trouvé à la maison : "72 + 9 = 81" alors, neuf fois neuf, c’est quatre-vingt-un !"

    Par cœur ou "comprenette" ? "Comprenette" ou "par cœur" ?
    Les deux, mon général !

    Ecrit par : catmano | 17 septembre 2009

    (remarque 1 : Catmano est institutrice dans une classe à plusieurs niveaux. Je ne compte plus les commentaires qu’elle a écrit comme celui-ci, qu’il faudrait retrouver, classer, éditer…)

    (remarque 2 : le commentaire vient du blog de JP Brighelli, lequel tanne , ou tout au moins a longtemps tanné Catmano pour qu’elle rassemble ses écrits et en fasse un livre).

    Réponse
  30. je passe de billet en billet, et je t’aime, le Monolecte
    bisous

    Réponse

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