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Desperates hours

Par Agnès Maillard
4 octobre 2005

Il existe des films dont même la distribution éclatante ne peut faire oublier l’austérité du sujet et que, du coup, nous allons voir à reculons.
Dommage pour nous!

The Hours, l'afficheThe Hours tisse le destin mêlé de 3 femmes dans la force de l’âge : une femme au foyer coincée dans une petite banlieue américaine des années 50, une éditrice new-yorkaise talentueuse de notre époque, embourgeoisée, qui se dévoue au chevet de son ex-amant d’un été et prépare dans l’élan une grande réception et Virginia Woolf, écrivaine fiévreuse engluée dans les codes de l’Angleterre victorienne, qui se lance dans l’écriture de Mrs Dalloway : "Toute la vie d’une femme dans une seule de ses journées".

Chaque histoire renvoie à l’autre : L’une l’écrit, la deuxième la lit, la troisième la vit. Mais c’est toujours la même histoire : celle de l’enfermement des femmes dans des vies étriquées, enfermement rarement choisi, souvent subi.

Condition de la femme moderne

Hannah Arendt écrit que la viva activa de l’homme moderne s’articule forcément autour de trois activités humaines fondamentales :

  1. le travail, soumission à notre condition animale, à la nécessité de se nourrir
  2. l’œuvre, le monde des objets, des créations qui s’inscrivent dans l’espace-temps
  3. l’action, la relation aux autres, le politique, qui transcende la diversité humaine.

Trois activités liés à la condition essentielle de l’homme : sa mortalité.

Nicole Kidman méconnaissable dans The HoursOr, si l’on regarde The Hours pendant que l’on lit la condition de l’homme moderne de Arendt, on ne peut s’empêcher de faire la jonction entre ces deux activités à première vue si disparates : la condition de la femme, qui finalement, évolue bien peu. Ces trois vies de femmes se caractérisent par l’enfermement imposé par des règles induites et intériorisées, une époque, une représentation sociale contraignante du rôle de la femme, le retrait, une forme de dévouement presque obscène aux autres et la négation de soi. Des vies qui n’accèdent à aucune des conditions nécessaires de la viva activa. La femme se retrouve à l’ombre de l’accomplissement de la vie de l’homme, dépouillée de son propre droit à exister et finalement confrontée à la vacuité de son existence.
The Hours, c’est donc le portrait en une seule journée de trois femmes qui ressentent assez brusquement et confusément le vide d’une existence imposée tant par renoncement que par soumission au regard extérieur. Il s’agit aussi de trois femmes qui fondamentalement transgressent les codes qui les enferment :

  1. Virginia refuse la place qui lui est allouée, elle crée, elle écrit, elle est dans l’œuvre. L’affrontement avec la cuisinière de la maison est assez emblématique du rejet des rôles traditionnels par Virginia : elle se dérobe à son devoir de maîtresse de maison qui exige d’elle de tout régenter.
  2. Avec une tendresse ironique, le poète joué par Ed Harris surnomme Clarissa Vaughan, l’éditrice qui s’occupe de lui depuis des années : Mrs Dalloway, du nom du personnage du roman éponyme dont elle partage l’existence, en ce jour de réception. Elle finit par se demander si son existence n’est pas futile, pendant que le vernis élaboré pendant toutes ces années craque de toutes parts.
  3. Laura Brown étouffe dans sa vie de ménagère pour réclames des années 50, rejette ses rôles de femmes au foyer parfaite, de femme aimante, d’amie compréhensive et discrète et de mère attentive. Le regard des autres lui pèse. Elle ne supporte plus l’image qui lui est renvoyée. La lecture du livre de Woolf lui ouvre d’autres perspectives en la renvoyant au caractère vain de sa propre existence. Elle doit s’évader. Elle pense au suicide. Elle choisira la vie et l’opprobre générale.

Trois existences qui se rejoignent dans le roman de Virginia Woolf et qui racontent la même exclusion de la viva activa.

Desperates Housewives

La nouvelle série qui a fait un tabac aux Etats-Unis et qui débarque sur Canal+ creuse-t-elle le même sillon que The Hours, avec un humour déjanté en plus? Drôle de question. Pourtant, l’univers des séries a bien changé ces dernières années. Même si le moteur principal de presque toutes est de deviner qui va coucher avec qui, les thèmes abordés en filigrane des intrigues plutôt indignifiantes insignifiantes[1], sont eux particulièrement forts et ancrés dans leur temps.
Mais de là à espérer une analyse de la condition de la femme moderne à la hauteur de The Hours, c’est peut-être beaucoup demander… wait and see[2]! Mais l’humour est parfois une arme féroce pour dépeindre les aspects les plus sordides de la condition humaine actuelle.

The Hours n’est pas un film pop-corn, on s’en serait douté. C’est un de ces films trop rares qui poussent à la réflexion, voire à l’introspection, et qui pourtant ouvre une multitude d’univers mentaux. Bien sûr, le casting est à la hauteur du sujet, mais l’on passe étrangement beaucoup de temps à tenter de retrouver les traits mutins de Nicole Kidman dans le visage austère et tourmenté de Virginia Woolf. Encore une performance d’actrice partie à la recherche d’un Oscar, ce qui ne manqua pas de lui arriver pour ce film.
Quoi qu’il en soit, un film capable de nous pousser à nous replonger dans un livre de philo mérite d’être vu, tout simplement.

Notes

[1] Merci à Laurent pour sa relecture attentive de mes fautes, encore que le néologisme indignifiantes me parle aussi beaucoup et ne manque pas d’intérêt. Il est vrai que la plupart de mes billets sont écrits en un seul jet, toujours dans une sorte de compulsion verbeuse un peu floue, et mes deux ou trois relectures dans la foulée ne me permettent jamais de repérer toutes les coquilles, souvent issues de la bien connue polio du clavier

[2] Attendons donc de voir ce que cela donne quand nous aurons l’occasion de découvrir ce phénomène de société…

19 Commentaires

  1. C’est marrant, je me suis fait les mêmes réflexions que toi en découvrant, sans doute en même temps que toi, le film et la série… Evidemment, le film condense de manière bien plus profonde en 1h30 que la série ces thèmes infiniment passionnants de la condition et de l’épanouissement féminins, mais on trouve malgré tout dans la série une chouette et représentative galerie de portraits de femmes, où chacune se débat comme elle le peut avec ses problèmes spécifiques…

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  2. Pour la série, il va falloir que l’on attende 3 siècles, vu qu’on a lourdé Canal+ depuis des lustres et qu’on ne capte ni TF1 ni M6 qui selon les dernière rumeurs, va diffuser la série.
    Mais le film…, je suis toujours sous le coup de ces portraits de femmes que Jane Campion aurait tant voulu réussir!

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  3. The Hours… franchement déprimant et au final… euh… déprimant.

    Desperate Housewives c’est bien. Drôle, léger sur la forme mais quand même corrosif. On le trouve via bittorrent, la saison 1 est très très bien.

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  4. Mama mia, Fred! Toujours à me sauver au bon moment. Je n’ai pas de reflex pirate, je ne pense jamais au bittorent. Encore que c’est même pas du piratage : il s’agit d’un truc que je ne peux pas voir pour de vulgaires considérations géo-morphologiques. Tu as déjà fait un billet sur les clients torrent, les flus et tout ça? Et pour Linux, comment ça marche?

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  5. Tant qu’on est dans la polio, et comme ne le fait pas remarquer Fred (trop poli probablement, ce que je peux me permettre de ne pas être, étant assez loin de toute représaille), c’est « desperate » en bon anglais, « desesperate » étant un gallicisme (en tous cas un barbarisme) qui jouit néanmoins de plus de 22 000 occurrences sur google. Tu peux toujours plaider la mauvaise influence :).

    Sur le fond : je ne sais pas si je verrai ce film, mais déjà ta note me donne envie de lire les bouquins que tu cites.

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  6. Non, non, merci Blip! Les fautes sont faites pour être corrigées!

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  7. Agnès > Tu as déjà fait un billet sur les clients torrent, les flus et tout ça? Et pour Linux, comment ça marche?

    Couldn’t be simpler:

    1. Télécharger un client BitTorrent. Perso, j’utilise urlhttp://www.bitcomet.com//url

    2. Paramétrer ton firewall pour qu’il autorises les flux entrant et sortant à destination de cette appli

    3. Chercher un fichier .torrent sur divers sites comme ceux-là

    http://www.torrentreactor.net/search.php?search=&words=desperate+housewives&cid=8

    http://www.bitenova.org/search.php

    http://www.torrentz.com/s.php?q=desperate+housewives

    http://isohunt.com/torrents.php?ihq=desperate+housewives&ext=&op=and

    http://www.torrentbox.com/torrents-search.php?search=desperate+housewives&cat=0&onlyname=yes&submit=Search

    http://www.torrentspy.com/search.asp?query=desperate+housewives&submit.x=14&submit.y=14

    http://www.torrentreactor.to/torrents/search

    http://www.flextorrents.com/search.php?file=23a2ac0e56e96898a2ffb80538c8f2727504ed85.html&q=desperate%20housewives

    4. Si le téléchargement du fichier .torrent ne lance pas automatiquement l’appli BitTorrent liée à cette extension, lancer BitComet, et lui passer le fichier en entrée

    Réponse
  8. Désolé, pas encore de billet sur bittorrent, ni de son installation sur linux (pas encore testé, j’attends la sortie de suse 10 pour réinstaller tout mon systeme etc). Mais je note la suggestion. Sous windows, j’utilise azureus qui est basé sur java et qui marche correctement.

    Qu’est ce que tu as comme distribution ? Une ubuntu c’est ça ? Je ne maitrise pas bien les distrib debian…

    Dans le principe, il faut qu’un client bittorrent soit installé et configuré (basiquement, il suffit en général d’indiquer l’emplacement de stockage des fichiers), et que la laison soit faite entre les fichiers .torrent et ce client afin que lorsque tu cliques sur un tel fichier le telechargement se lance automatiquement (De memoire tu dois pouvoir le faire dans le panneau de config de kde ou gnome si ça ne se fait pas à l’installation). Tu trouveras ici une liste de moteur de recherches de torrent. Tu peux y trouver la version française, mais je te conseille la VOST, la diction distinguée des bourgeoises désespérées fait partie de leur charme.

    Concernant la faute, je ne l’avais tout simplement pas remarquée.

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  9. bsr, je vais avoir des difficultés à exprimer ma reflexion, (je fais facilement dans le confus…désolé par avance!) mais dans la reflexion des trois femmes (et de la série) y a t il une place(?) un questionnement sur la « maternité » (je doute vraiment de mes mots!!!), sont elles « marginales » (plein de guillemets et aucun jugement de valeur!) accessoirement je me disais qu’un enfant remplissait de façon « primaire/basique »(à sa façon……avec plein de guillemets!) la « viva activa » ! (suis je trivial? completement à coté?) merci et désolé pour les confusionnismes!

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  10. Bonne question qui mérite un visionnage urgent du film, puisque c’est la question que doit résoudre Julianne Moore dans le rôle de laura Brown, la bonne épouse, mère de famille des années 50. A priori, le fait d’être enceinte ne comble pas sa vie. Je dirais que l’enfantement est une étape importante dans la vie d’un être humain, homme ou femme, mais qu’il ne consiste en aucun cas en une condition de la viva activa. Faire un enfant ne correspond pas à la création d’une oeuvre, même si l’élevage est un boulot à plein temps. Souvent, y compris et surtout pour les femmes modernes qui sont dans l’action, l’arrivée de l’enfant les renvoie très rapidement à l’enfermement dans un rôle traditionnel, au retrait du travail, de l’oeuvre et de l’action. Et quelque soit la qualité de la relation avec l’enfant, ce retrait, souvent subi et non choisi provoque aussi une sensation de vide de vacuité existentielle.

    Réponse
  11. bjr, je suis peut etre hors-sujet, mais en lisant le lien: « trois activités humaines », je suis vraiment convaincu que l’enfant peut etre la « viva activa »: le travail, c’est evident, c’est peut etre ce qui ressort le plus! mais l’éducation (le fait que vous utilisiez « elevage » est, à mon sens, une échappatoire!!?) peut/doit etre une oeuvre d’art, de reflexion intense (et c’est pourquoi que c’est le plus souvent « mission impossible »!) et l’action, la relation humaine, vous pouvez constater que l’energie déployée par les mères (en général?) et par les pères, c’est dans l’espoir d’un monde meilleur pour leurs enfants (et parfois même pour les enfants des autres!). C’est surement on ne peut plus trivial, mais voyez dans les manifs, associations, et grands patrons, ils se battent pour leurs enfants,, un(e) celibataire baissera les bras plus rapidement (je caricature….) peut etre que si les prêtres et nonnes avaient des enfants, ils se battraient pour un monde meilleur, ici et maintenant, et pas pour un paradis « là-bas »…. enfin (suite et fin « café du commerce et caricature! » désolé , je ne veux pas « troller »!!) on peut boire du thé en cinq minutes, reflexe addictif, ou ritualiser et passer deux heures en « goutant » chaque geste. Ne peut-il pas etre de même et passer de l’elevage à l’education? (basse provoc!) n’est ce pas le problème de ces personnes? (les trois heroïnes) en fait qu’est-ce qui pourrait les « accomplir »? ps1 (bon…je suis célibataire sans enfant….!) ps2 super bravo pour vos textes cela aide à vivre!

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  12. Sur le même sujet je me permet de conseiller également : – Waiting women.

    Ingmar Bergman (1952) d'une modernité incroyable pour l'époque, 8 ans avant la nouvelle vague française.

    Une femme coréenne sorti en avril dernier en France, c’est à nouveau un film coréen (vous l’aviez peut-être deviné!) qui donne un sérieux coup de vieux au cinéma français actuel. Franchement si vous l’avez raté j’ai les boules pour vous.

    Sinon pour the hours, c’est vrai que c’est un film étonnant de la part d’holywood, le fond est bien traité mais la forme reste un tant soit peux académique. Enfin je me suis engeulé avec ma femme à la sortie parce que, sois disant, je suis un être insensible, incapable de comprendre ce que ressentent les femmes. Un homme quoi !

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  13. C’est vrai que le cinéma coréen est très inventif, très intéressant à découvrir et explorer en ce moment. J’ai vu Deux Soeurs récemment… pffff! En dehors de l’aspect horrifique du film la construction du récit est remarquable.

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  14. Le dernier chef d’oeuvre Coréen c’est « Memories of murder » sorti en même temps que « les deux soeurs » et bien supérieur à mon avis. UN film parfait à tous les niveaux. Essaye.

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  15. Oui, effectivement, Memories of murder est un très grand film, un polar épais et poisseux absolument prenant. Il ne joue pas dans la même catégorie que 2 systers, ce n’est d’ailleurs pas le même genre. J’ai pensé d’abord à 2 soeurs, parce que je l’ai vu plus récemment, tout simplement!
    Encore dans un autre genre, mais tout aussi fabuleux, le Printemps, été, automne, hiver… et printemps de Kim Ki-duk, avec une photo à couper le souffle et une histoire terriblement bien foutue.
    Le film coréen est carrément en pleine forme aujourd’hui, tant en qualité qu’en inventivité : la nouvelle vague, il faut la surfer chez eux!

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  16. Aaaah! The Hours! J’ai vu le film et j’ai lu le livre… Tout les deux sont remarquablement poignants. Je m’apprête d’ailleurs à faire l’analyse d’une séquence du film comme dossier final de mon semestre à la fac. J’ai choisi la scène où Laura Brown reçoit chez elle la visite de son amie Kitty…

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  17. C’est une scène terrible et le jeu des actrices est particulièrement fin. L’essentiel de cette scène est dans les silences, les regards qui s’évitent, les non-dits. Délicat pour une analyse. Mon mari, lui, avait choisi la scène d’ouverture des Affranchis, ce long plan-séquence qui nous immerge directement dans l’univers mafieux du héro. Un beau moment de cinéma aussi, un film devenu un classique depuis.

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  18. Une chose surprenante dans les commentaires, au demeurant fort intéressants, à propos de "the hours"…certes il est question de femmes qui luttent contre une forme d’asservissement, des contraintes de rôle affreusement pesantes…mais d’autant plus pesantes qu’elles butent contre leur sentiment profond de ne pas être dans le mainstream de l’orientation sexuelle ambiante…le mot "lesbienne" écorcherait-il la langue? Encore que le sentiment de vide repéré dans chacun des personnages n’est pas nécessairement à référer à une éventuelle difficulté à assumer et extérioriser ses penchants (notamment Clarisse)….l’interrogation récurrente du fonctionnement résulte sans doute assez souvent d’un sentiment d’une inadéquation pointée par le social sans qu’il s’agisse forcément de sexualité (la maladie mentale, le handicap mental ou physique, le fait d’être noir, le fait d’être femme…). Toutefois, il semble là que cette question soit cruciale: si Clarisse assume son homosexualité (tout en étant profondément amoureuse d’un homme homosexuel…fin 20è siècle), Virginia et sa comparse, dont j’ai oublié le nom mais nommable via son activité principale de "femme-au-foyer veillant-sur-vétéran", sont sur le chemin de la libération et d’une certaine façon l’assument aussi: L’une en s’en allant crever -contradictoire?-(début du 20è siècle) et l’autre en affrontant vaillamment son destin en pleines 50’s après avoir été tentée par l’inhibition extrême . La pulsion de mort comme force de vie ne trouvant parfois d’issue que dans la négation de soi-même…voilà à quoi étaient soumises les femmes aimant les femmes! Ca n’a peut-être pas beaucoup changé!

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  19. Merci pour cet éclairage, Nathalie.
    Pour ma part, je n’ai absolument pas perçu cette question de l’homosexualité féminine, mais maintenant que tu en parles, cela expliquerait l’attachement (voire le suriçnvestissement) un peu absurde de Clarisse à son vieil amant homosexuel.

    Réponse

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